L’arrestation de Julian Assange aujourd’hui à l’ambassade d’Equateur à Londres relève d’«une vengeance personnelle» du président Lenin Moreno, a accusé le prédécesseur de ce dernier à la tête de l’Equateur, Rafael Correa, dans un entretien avec l’AFP à Bruxelles.
«C’est une vengeance personnelle du président Lenin Moreno parce que WikiLeaks il y a quelques jours a publié un cas de corruption très grave», a affirmé Rafael Correa, qui fut président de l’Equateur de 2007 à 2017, année où il a décidé de s’exiler en Belgique.
Il s’agit, a affirmé l’ex-chef d’Etat, de la révélation par le site Wikileaks «au niveau mondial» de l’existence d’«un compte secret au Panama, à la Balboa Bank», au nom de la famille Moreno. La semaine dernière, WikiLeaks déjà avait établi un lien entre le risque d’expulsion d’Assange et la publication d’informations privées compromettantes pour Lenin Moreno. «Des rumeurs injurieuses!», avait réagi Quito. Selon Rafael Correa, ces accusations de corruption ont été «l’élément détonateur» qui a poussé Lenin Moreno à se «venger» en permettant à la police britannique d’entrer dans l’ambassade de Londres pour arrêter Assange.
«Quelque chose d’incroyable, vraiment sans précédent», a-t-il dénoncé, rappelant que le fondateur australien de WikiLeaks, âgé de 47 ans, avait acquis en 2017 la nationalité équatorienne. Dans un tweet en fin de matinée, Rafael Correa avait déjà fustigé son ancien allié, ex vice-président sous sa mandature, le qualifiant de «plus grand traître de l’histoire latino-américaine». Moreno a défendu le retrait de l’asile accordé à Assange, une décision présentée comme «souveraine».
Connu comme une figure de la gauche sud-américaine, Correa a assuré jeudi que Moreno avait agi «sous la pression» des Etats-Unis de Donald Trump. Il a laissé entendre que Julian Assange aurait servi de monnaie d’échange afin que le nouveau président équatorien obtienne le soutien de Washington pour un prêt du FMI. Julian Assange s’était réfugié à l’ambassade équatorienne à Londres en 2012 pour éviter d’être extradé vers la Suède, où il était accusé de viol. A l’époque, a rappelé Rafael Correa, l’Equateur avait offert l’asile à l’Australien car «il n’avait pas la garantie d’un procès juste aux Etats-Unis».
Outre le dossier suédois, Julian Assange craignait aussi d’avoir à faire face, in fine, à la justice américaine pour la publication de milliers de documents confidentiels par Wikileaks. Aujourd’hui, le ministère américain de la Justice a souligné qu’il avait été arrêté en vertu d’une demande d’extradition des Etats-Unis, où il est inculpé d’association de malfaiteurs en vue de commettre un «piratage informatique», ce qui pourrait lui valoir 5 ans de prison. Pour la justice britannique, il est aussi coupable d’avoir violé les conditions de sa liberté provisoire à Londres, un délit passible d’un an de prison.