Le nouveau parti anti-Brexit Change UK a lancé mardi sa campagne en vue des élections européennes, un scrutin en forme de boulet pour la Première ministre Theresa May, qui, incapable de concrétiser le divorce avec l’UE, se retrouve de nouveau confrontée à des appels à la démission.
Un mois avant le scrutin européen, prévu le 23 mai au Royaume-Uni, le parti europhile Change UK, fondé par des transfuges travaillistes et conservateurs, a présenté ses candidats à Bristol (ouest de l’Angleterre).
Parmi eux se trouvent des personnalités aux profils variés comme Rachel Johnson, sœur du député conservateur et ancien ministre des Affaires étrangères Boris Johnson, qui défend, lui, un Brexit dur; Gavin Esler, ancien journaliste de la BBC; ou encore l’économiste Jan Vincent Rostowski, ancien vice-premier ministre de Pologne.
Le gouvernement britannique, qui s’est réuni en fin de matinée lors d’un Conseil des ministres, compte cependant bien pouvoir annuler ces élections, près de trois ans après le référendum du Brexit, s’il arrive à faire adopter d’ici le 22 mai le Traité de retrait de l’UE par les députés.
Les parlementaires ont déjà rejeté ce texte, conclu fin novembre, à trois reprises contraignant Theresa May à demander deux reports de la date du Brexit, initialement fixée au 29 mars, au 12 avril puis au 31 octobre.
Pour tenter sortir de l’impasse, la dirigeante conservatrice a entamé début avril des discussions avec l’opposition travailliste afin de trouver un compromis. Elles ont repris mardi après onze jours de pause, mais sans permettre d’avancée notable.
« Les discussions avec le Parti travailliste ont été sérieuses mais difficiles sur certains aspects, notamment en ce qui concerne le calendrier de ces pourparlers », a déclaré un porte-parole du gouvernement après la rencontre.
« Lignes rouges »
Le chef du Labour, Jeremy Corbyn, a lui reproché au gouvernement son refus de modifier ses « lignes rouges ».
« Nous allons continuer à plaider notre cause, mais sincèrement, l’approche du gouvernement doit changer, » a-t-il déclaré. « Ils ne peuvent pas continuer à ressortir ce qui a déjà été catégoriquement rejeté à trois reprises par le Parlement ».
La Première ministre veut un retrait de l’union douanière et du marché unique européen, afin que son pays puisse nouer ses propres relations commerciales et contrôler l’immigration en provenance de l’UE. Les travaillistes, eux, veulent rester dans l’union douanière et maintenir les relations les plus étroites possibles avec l’UE.
Si aucune solution n’émerge, le gouvernement proposera au Parlement une série d’options sur le Brexit « avec un système (…) obligeant le Parlement à choisir l’option qu’il préfère, au lieu de voter contre tout », a précisé le vice-Premier ministre, David Lidington.
Lors d’une série de votes indicatifs en mars et début avril, les députés avaient en effet recalé toutes les propositions alternatives, qu’ils avaient eux-mêmes formulées, sur la future relation avec l’UE.
« Ressusciter la bête »
Du côté des conservateurs, les yeux sont rivés sur le comité 1922, responsable de leur organisation interne, qui devait se réunir pour discuter, selon la presse britannique, du départ de Theresa May.
« Je serais ravi si elle annonçait aujourd’hui qu’elle démissionnait, nous pourrions alors procéder à une élection pour choisir un nouveau chef », a déclaré le député Nigel Evans, secrétaire exécutif du comité 1922, sur la radio BBC4.
Alors que Theresa May refuse jusqu’ici de laisser sa place, certains voudraient lui imposer un départ. Mais cette manœuvre n’est possible que si le comité 1922 approuve une modification de son règlement.
En effet, Theresa May a remporté une motion de défiance organisée par son parti en décembre, ce qui lui laisse un délai de 12 mois avant d’être confrontée à une nouvelle tentative pour la déloger. Le comité pourrait voter mardi pour raccourcir ce délai de 12 à 6 mois, ce qui ramènerait la fin du sursis au 12 juin.
Pour certains conservateurs, ce changement à la tête de l’exécutif est rendu d’autant plus pressant par l’imminence des élections européennes.
« Le gros problème que nous avons, c’est que nous fonçons dans le mur aux élections européennes », a estimé l’ancien chef du parti, Iain Duncan Smith, sur la BBC.
Il a expliqué craindre la percée du Parti du Brexit, emmené par l’europhobe Nigel Farage, qui avait déjà remporté les élections européennes à la tête d’un autre parti, l’Ukip, en 2014.
« Si nous participons aux élections européennes, nous ferons monter le Parti du Brexit, et ce sera un cauchemar pour nous. On s’est débarrassé de l’Ukip avec le référendum. Nous ne voulons pas ressusciter la bête ».