Les Espagnols se rendent aux urnes, dimanche 28 avril, pour des élections législatives anticipées. Lundi, un premier débat télévisé a été diffusé avec les quatre principaux candidats. La Catalogne et le jeu des alliances ont été au cœur du débat.
Difficile de dire qui des quatre candidats espagnols a sorti son épingle du jeu, lors du débat télévisé sur une chaîne publique, lundi 22 avril. Les Espagnols, qui se préparent à voter dimanche pour les élections législatives anticipées, annoncées par le Premier ministre socialiste Pedro Sánchez le 15 février dernier, ont pu se faire une idée en écoutant les arguments des quatre principaux candidats aux élections. Parmi eux, Pedro Sanchez, le conservateur Pablo Casado (Parti Populaire, PP), le libéral Albert Rivera de Ciudadanos et le dirigeant de la formation de gauche radicale Podemos, Pablo Iglesias. L’extrême droite de Vox n’a pas été autorisée à participer au débat par les autorités en raison de son absence de représentation parlementaire.
La Catalogne cristallise les tensions
Pablo Casado et Albert Rivera ont tour à tour utilisé la crise catalane pour attaquer le chef du gouvernement sortant Pedro Sanchez. Le candidat conservateur et le libéral l’ont en effet accusé de d’être arrivé au pouvoir en juin grâce aux voix des indépendantistes catalans, qui avaient soutenu sa motion de censure contre Mariano Rajoy (PP). « Ceux qui veulent casser l’Espagne ont Sanchez comme candidat favori », a notamment assené Pablo Casado
Il sont en outre allés plus loin, affirmant que Pedro Sanchez était prêt à « gracier » les dirigeants séparatistes actuellement jugés à Madrid pour leur rôle dans la tentative de sécession de la Catalogne en 2017, s’ils étaient condamnés. Pedro Sanchez a qualifié ces allégations de « mensonge ». Il a de son côté mis en garde contre la tentation d’une alliance avec l’extrême droite. « Je croyais que Trump n’allait pas gagner et il a gagné, je croyais que le Brexit n’allait pas se produire et il s’est produit, je croyais qu’en Andalousie, le PP, Ciudadanos et l’ultradroite n’allaient pas conclure un accord et ils l’ont conclu », a-t-il indiqué, faisant référence à l’investiture en janvier d’un gouvernement PP-Ciudadanos grâce aux voix de Vox dans ce fief socialiste du sud de l’Espagne.
Pas sûr que ces saillies suffisent à départager ces candidats au coude-à-coude. Si les sondages donnent Pedro Sanchez gagnant des élections de dimanche avec 30 % des voix, ils ne le créditent pas d’une majorité absolue. « À ce stade de la campagne, il y a énormément d’indécis à convaincre », explique Valérie Labonne, journaliste et observatrice de la politique espagnole sur France 24. Une chose est sûre, « ce dernier devra passer par une coalition s’il veut l’emporter et avoir les coudées franches pour gouverner », poursuit-elle. Dans ce jeu d’alliances, les indépendantistes basques et le parti Podemos, bien qu’actuellement en disgrâce dans les intentions de vote, pourraient jouer un rôle décisif.
L’arrivée de l’extrême droite au parlement
Autre nouveauté dans ce scrutin, Vox pourrait faire son entrée à la chambre des députés avec 29 à 37 députés sur 350, selon les sondages. Ce parti d’extrême droite prône notamment l’expulsion de tous les sans-papiers, l’interdiction des partis indépendantistes ou une remise en cause de la loi contre les violences faites aux femmes.
Un nouveau parti qui vient à nouveau rebattre les cartes du jeu politique déjà fragmenté depuis 2015. Lors des élections générales, les citoyens espagnols avaient déjà mis fin au bipartisme avec la percée de Podemos et Ciudadanos dans le jeu politique. Les élections suivantes n’ont fait que confirmer la nouvelle offre politique.
« Cette instabilité est inattendue dans une Espagne où, pendant plusieurs années, droite et gauche ont alterné sans problème, estime Jean-Jacques Kourliandsky, chercheur à l’IRIS, dans l’une de ses publication. Les raisons objectives ont sans doute joué. L’insubordination constitutionnelle catalane ‘gèle’ une part importante des électeurs catalans espagnols de droite et de gauche. L’afflux de migrants dans un pays ayant envoyé les siens pendant longtemps aux Amériques et en Europe l’a déstabilisé. La longue crise économique et le chômage de masse ont dilué bien des allégeances partisanes. »
Dans ce contexte politique instable, « les responsables de partis mettent toute leur énergie dans cette première bataille, car ces premières élections vont déterminer les suivantes », assure Valérie Labonne.
Les quatre candidats se retrouveront tout de même dès mardi pour un second débat télévisé sur des chaînes privées.