Les Etats-Unis ont rappelé mercredi leur personnel diplomatique non-essentiel en Irak en invoquant une « menace imminente » en « lien direct » avec l’Iran voisin, mais Donald Trump a renouvelé ses appels au dialogue malgré l’escalade des tensions.
« Je suis sûr que l’Iran voudra bientôt discuter », a lancé le président américain sur Twitter.
Malgré sa campagne de « pression maximale » à l’égard de Téhéran, ce n’est pas la première fois qu’il fait des ouvertures verbales — jusqu’ici sans succès.
Soufflant, dans ce dossier comme dans d’autres, le chaud et le froid au gré des interventions, il avait mis en garde lundi les dirigeants iraniens contre tout passage à l’acte. « S’ils font quelque chose, ils vont souffrir énormément », avait-il prévenu.
L’administration du milliardaire républicain a fait monter la pression sur Téhéran depuis dix jours et a ostensiblement renforcé sa présence militaire dans le Golfe, faisant état de préparatifs iraniens d’attaques aux contours encore flous contre des intérêts américains dans la région.
Dans la nuit de mardi et mercredi, le département d’Etat a annoncé avoir donné l’ordre de partir au personnel américain gouvernemental non essentiel de l’ambassade à Bagdad ainsi que du consulat à Erbil, au Kurdistan irakien, « en raison du flux de menaces accru ».
« Il s’agit d’une menace imminente contre notre personnel », a ensuite déclaré un haut responsable américain à des journalistes à Washington. Cette menace « est réelle », a-t-il insisté, évoquant notamment la responsabilité de « milices irakiennes sous commandement et contrôle des Gardiens de la Révolution iraniens », l’armée idéologique de la République islamique d’Iran.
« C’est directement lié à l’Iran, de multiples flux de menaces en lien direct avec l’Iran », a renchéri un autre responsable.
« Maximum de retenue »
Le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo avait effectué la semaine dernière une visite surprise à Bagdad pour, avait-il expliqué, partager avec les dirigeants irakiens « les informations qui indiquent une escalade des activités de l’Iran ». Il avait déclaré avoir reçu des garanties quant à la protection des « Américains dans leur pays ».
Les responsables américains ont assuré que ce rappel de diplomates n’était pas motivé par une action militaire imminente des Etats-Unis contre l’Iran ou ses groupes alliés et Mike Pompeo avait affirmé mardi à Sotchi en Russie que Washington ne cherchait « pas une guerre avec l’Iran ».
Peu après la décision américaine, les armées allemande et néerlandaise ont annoncé avoir suspendu jusqu’à nouvel ordre leurs opérations de formation militaire en Irak.
Alors que le guide suprême iranien Ali Khamenei avait assuré mardi qu’il « n’y aurait pas de guerre avec les Etats-Unis », le président Hassan Rohani a lui évoqué une « guerre économique » menée par Washington.
« Cette période de l’histoire est la plus fatidique pour la Révolution islamique car l’ennemi a mis en jeu toutes ces capacités contre nous », a estimé le chef des Gardiens de la Révolution, Hossein Salami, leur promettant l’échec.
Le Kremlin s’est pour sa part dit inquiet de cette « escalade des tensions » qui « se poursuit », accusant Washington de « provoquer » Téhéran.
Le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, a jugé « inacceptable » jeudi matin à Tokyo « l’escalade de tensions provoquée par les Etats-Unis » à l’encontre de son pays.
« Nous agissons avec le maximum de retenue », a-t-il ajouté, en référence à la réaction de son pays face à la décision du président américain Donald Trump de sortir les Etats-Unis de l’accord de 2015 censé empêcher Téhéran de fabriquer la bombe atomique. Le ministre iranien a assuré que son pays maintenait son « engagement » vis-à-vis de la communauté internationale dans le cadre de cet accord.
Embarras
Soupçonnée d’alimenter l’escalade en exagérant le niveau de la menace, l’administration Trump a plaidé mercredi la sincérité.
D’autant qu’elle a été plongée dans l’embarras par le général Chris Ghika, un porte-parole britannique de la coalition internationale, sous commandement américain, présente en Irak et Syrie pour lutter contre les jihadistes, qui a démenti mardi toute « aggravation de la menace posée par les forces pro-iraniennes ».
Le Pentagone et le département d’Etat se sont relayés pour minimiser et contredire ses propos.
Selon le New York Times, le ministre américain de la Défense, Patrick Shanahan, a présenté à des conseillers de Donald Trump un plan selon lequel jusqu’à 120.000 hommes pourraient être envoyés au Moyen-Orient si l’Iran attaquait des forces américaines. Un projet démenti par le président des Etats-Unis, qui a toutefois prévenu: « Si nous devions le faire, nous enverrions beaucoup plus d’hommes que ça ».
Autres sources de tensions, de mystérieux « actes de sabotage » de quatre navires au large des Emirats arabes unis, dont les auteurs restent inconnus, et une attaque de drones contre des stations de pompage de pétrole en Arabie saoudite qui a été revendiquées par les rebelles Houthis du Yémen, soutenus par Téhéran.
Les Emirats ont plaidé mercredi pour une désescalade des tensions.