L’Instance Vérité et Dignité tunisienne a affirmé à France Inter qu’elle avait documenté des violations commises par l’aviation et les parachutistes français en 1956 en Tunisie, alors que le pays avait acquis son indépendance. Pas moins de 5.000 morts, dont seulement 300 militaires, ont été recensés. L’instance demande réparation.
Dans une déclaration à France Inter, Sihem Ben Sedrine, présidente de l’Instance Vérité et Dignité (IVD) chargée de la justice transitionnelle en Tunisie, affirme que la France a commis des crimes dans le pays en 1956, alors qu’il était indépendant. Elle a demandé aux autorités françaises d’indemniser les familles des victimes selon le barème établi par l’instance qu’elle dirige.
«Les premières violations commises par l’État français à travers ses parachutistes et son aviation, c’est en juillet 1956», a-t-elle déclaré, ajoutant que «la Tunisie était indépendante, et ils ont pilonné tout le sud et ont tué des centaines de Tunisiens».
La responsable assure que l’IVD a documenté ces crimes dans les moindres détails, soulignant que «le grand massacre, c’était celui de Bizerte». «Ils ont tué un peu moins de 5.000 personnes», a-t-elle ajouté, précisant que parmi les morts il y avait «environ 300 militaires, mais tous les autres étaient des civils».Quant à la question des indemnisations, Mme Ben Sedrine précise que, selon le barème établi par l‘IVD, «un homicide, c’est 200.000 dinars (environ 62.000 euros)». «Concernant l’affaire de Bizerte, multipliez par 5000 personnes pour faire la somme (environ 310 millions d’euros)», a-t-elle résumé.
Ainsi, Sihem Ben Sedrine a indiqué que l’IVD enverrait en juillet à l’État français un dossier complet «avec le nombre de morts et tous les détails les concernant pour justifier ses demandes». «On demande à la France d’être cohérente avec les valeurs qu’elle défend», a-t-elle fait savoir, soulignant qu’«il est temps aujourd’hui que la France se réconcilie avec ses valeurs, et avec ses anciennes colonies. […] Et qu’on puisse construire un futur apaisé».L’Instance Vérité et Dignité a publié le 28 mars son rapport global consacré aux violations des droits de l’Homme qui couvre la période allant de l’occupation française de 1955 aux derniers événements de 2013. Dans ce document de plusieurs milliers de pages, l’IVD met en cause l’actuel Président de la République, Beji Caïd Essebsi, qui occupait le poste de directeur de la sûreté nationale en 1962, puis celui de ministre de l’Intérieur en 1965, sous la présidence d’Habib Bourguiba.