Vifs débats à l’Assemblée sur la définition des contenus haineux en ligne

Apologie de crime contre l’humanité, négationnisme, « agribashing », antisionisme… Des députés ont voulu étoffer dans la nuit de mercredi à jeudi la définition des contenus haineux en ligne ciblés par une proposition de loi LREM, ce qui a suscité de vifs débats à l’Assemblée.

Les députés examinaient la mesure phare du texte porté par l’élue de Paris Laetitia Avia (LREM) qui consiste à obliger plateformes et moteurs de recherche à retirer les contenus « manifestement » illicites sous 24 heures, 
sous peine d’être condamnés à des amendes jusqu’à 1,25 million d’euros.

Cet article premier visait préalablement les incitations à la haine, la violence, les injures à caractère raciste ou encore religieuses. Le député Philippe Dunoyer (UDI-Indépendants) a obtenu d’étendre le champ d’application du texte à l’apologie des crimes contre l’humanité mais pas au négationnisme, 
ce qui a animé les discussions dans l’hémicycle.

Il existe « une difficulté » à intégrer les actes de négation « parce que l’on est dans le cadre de dispositions qui nécessitent une lecture d’appréciation, une lecture de contextualisation… une lecture qui demande aux plateformes de ne pas juste appliquer », a expliqué Mme Avia. L’élue de Paris a indiqué avoir 
mené « un travail d’orfèvre » avec le Conseil d’Etat pour que le texte soit « conforme ».

« Ce qui compte c’est le champ des infractions pénales (…) celles qui existent déjà« , a renchéri la Garde des Sceaux Nicole Belloubet. »Comment pourrait-on admettre que l’on oublie quelqu’un qui nie l’existence 
des chambres à gaz  , a grincé le socialiste Hervé Saulignac. »Donc si quelqu’un nie la Shoah ou le génocide arménien, il n’est pas concerné ? », a raillé François Pupponi (Libertés et territoires), en critiquant 
une rédaction qui « ne tient pas la route ». L’élu de Sarcelles (Val-d’Oise) a ajouté que la loi Gayssot de 1990 réprime la contestation du génocide juif durant la seconde guerre mondiale.

Marc Le Fur (LR) a lui tenté en vain d’ajouter dans le périmètre du texte « l’agribashing », comme notamment « la stigmatisation des activités agricoles » et « l’incitation à des actes d’intrusion et/ou de violence vis à vis des 
professionnels de l’agriculture, de l’élevage« . »Vous allez créer deux catégories de violences, celles qui sont admises et celles qui ne sont pas tolérées », s’est insurgé l’élu des Côtes-d’Armor.

Plusieurs amendements intégrant l’antisionisme, la haine de l’Etat d’Israël dans le champ du texte, ou débattant de la définition de l’antisémitisme, ont eux aussi été rejetés.

« Ce n’est jamais le lieu, jamais le moment ! (…) », s’est agacé Meyer Habib (UDI-Indépendants) avant de quitter temporairement son fauteuil pour remettre à la ministre de la Justice un dossier rassemblant « les menaces de mort » qu’il a lui-même reçues « depuis le début de l’année ».

« Arrêtez de considérer que parce qu’on n’est pas d’accord avec vous on est insensible à l’antisémitisme ! C’est intolérable ! », lui a lancé l’Insoumis Alexis Corbière.

« Ce n’est pas au détour d’une loi comme ça que l’on peut faire évoluer le débat », a affirmé Stéphane Peu (PCF), alors qu’une proposition de résolution transpartisane pour une meilleure définition de l’antisémitisme doit être examinée à la rentrée.

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