Beleniuk, lutteur métis et aura été député malgré les préjugés en Ukraine

Zhan Beleniuk, médaillé olympique ukrainien de lutte gréco-romaine, aux origines rwandaises, est quasiment sûr de devenir le premier député métis à entrer au Parlement à l’issue des élections du 21 juillet, en dépit du racisme répandu en Ukraine.

Médaillé d’argent aux jeux Olympiques de 2016, Zhan Beleniuk est numéro 10 sur la liste du parti Serviteur du peuple du président Volodymyr Zelensky, en tête dans les sondages et largement devant ses rivaux grâce à son image de nouvelle force politique opposée aux vielles élites.

Selon les prévisions des sondeurs, sauf coup de théâtre, cette dixième position lui assurera d’être élu haut la main.

M. Beleniuk, qui a grandi dans un petit appartement à Kiev, est le fils d’une couturière ukrainienne et d’un pilote rwandais, tué lors de la guerre civile qui a décimé ce pays africain en 1994.

« Volodymyr Zelensky m’a invité à rejoindre son parti. Nous nous connaissions déjà », explique à l’AFP ce sportif de haut niveau, âgé de 28 ans, en campagne dans la petite ville de Boïarka, près de la capitale ukrainienne.

« Il me semble qu’il a vu en moi des qualités qui aideront à promouvoir le sport en Ukraine », indique M. Beleniuk, qui dit se sentir « 100% Ukrainien ».

L’élection du 21 juillet va prouver « que nous sommes un pays réellement moderne, qui traite toutes les races et tous les groupes ethniques de la même manière », ajoute-t-il.

La discrimination raciale est un problème récurrent en Ukraine où, rien que l’an dernier, des groupes ultranationalistes ont mené une vingtaine d’attaques principalement contre des campements de Roms, selon l’organisation internationale Human Rights Watch.

Zhan Beleniuk le reconnaît : « Il m’arrive d’être victime d’abus car je ne ressemble pas aux autres Ukrainiens ». Mais sa campagne n’a pour le moment rencontré que peu de racisme, affirme-t-il.

Un journaliste ukrainien l’a pourtant traité de « nègre » sur les réseaux sociaux, puis a supprimé son message après une vague de critiques de la part de ses confrères.

Un « défi »

Marquant de longues pauses, le lutteur pressent que la politique « ne sera pas aussi confortable que l’entraînement », mais « ce sera un défi ».

« J’ai une chance (…) d’influencer la situation et ce serait lâche de ma part de dire que je ne suis pas prêt à le faire ».

En entrant en politique, le champion du monde 2015 marche dans les pas de plusieurs autres anciens sportifs dont les plus connus sont le footballeur Andriy Shevchenko, Ballon d’Or 2004, et le champion du monde de boxe Vitali Klitschko, maire de Kiev depuis cinq ans.

Zhan Beleniuk est un des visages les plus connus de la cohorte de candidats jeunes et inexpérimentés présentés par le parti du président Zelensky. L’athlète estime néanmoins que ces « nouvelles personnes énergiques » seront capable de combattre la corruption endémique.

Créé en 2017, Serviteur du peuple n’a actuellement aucun siège au Parlement ukrainien, en majorité hostile au nouveau président triomphalement élu en avril.

La participation de M. Beleniuk aux législatives est une preuve de l’ouverture d’esprit des Ukrainiens, estime l’analyste politique Volodymyr Fessenko. « Nous n’avons pas de stéréotypes racistes négatifs », estime-t-il.

En 2016, le lutteur avait déjà cédé aux sirènes de la politique, accusant les autorités sportives d’inaction car elles n’avaient pas versé des aides financières promises.

A l’époque, il avait révélé que la Russie et l’Azerbaïdjan lui avaient tous deux proposé de le naturaliser et de le financer à condition qu’il renonce à sa citoyenneté ukrainienne.

Aujourd’hui, Zhan Beleniuk promet de poursuivre sa carrière sous le drapeau ukrainien et espère même pouvoir participer aux jeux Olympiques de Tokyo en 2020.

Malgré ses engagements sportifs, il assure vouloir aussi prendre part à toutes les sessions parlementaires et aux votes, en réponse à un absentéisme répandu chez les députés ukrainiens.

« Je ne prendrai des congés sans solde que lors des entraînements actifs » pour les jeux Olympiques, promet-il.

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