Trump toujours imprévisible, Johnson ligoté dans le nœud gordien du Brexit, Conte sur un siège éjectable…
Le club des démocraties libérales du G7 réuni par Emmanuel Macron dans le Sud de la France ce week-end fait pâle figure, mais essaiera de montrer sa pertinence géopolitique face aux multiples crises dans le monde.
Tensions dans le Golfe arabo-persique, guerre commerciale entre Washington et Pékin, urgence climatique… Les dossiers chauds s’accumulent, y compris la crise à Hong-Kong qui pourrait s’inviter à la réunion. Ou celle du Cachemire qui sera nécessairement évoquée puisque le Premier ministre indien Narendra Modi est invité dans la cité balnéaire de Biarritz placée sous la cloche d’un important dispositif sécuritaire.
Mais l’époque où le G7 pouvait présenter un front uni est révolue, « dans un monde qui est aujourd’hui très fragmenté, très volatil, où les cadres de référence n’ont plus forcément l’efficacité qu’ils avaient auparavant », résume une source proche de la présidence française.
Le principal élément instable de cet agrégat est bien évidemment Donald Trump. Mais plusieurs autres dirigeants sont dans des situations compliquées qui entravent leur capacité, comme Boris Johnson au cœur du psychodrame du Brexit, Angela Merkel en bout de course après 14 ans de pouvoir ou Giuseppe Conte dont le gouvernement est en péril en Italie.
« C’est le format et l’existence même du G7 qui sont en discussion, parce qu’il était devenu le lieu où l’ancien Occident avait la possibilité de se parler franchement et (…) d’affiner des positions communes qui sont très importantes dans les grands enjeux internationaux, et tout cela est en train de disparaître à cause de cet éparpillement », explique à l’AFP l’ancien Premier ministre italien Enrico Letta, doyen de l’école des Affaires internationales de Sciences Po à Paris.
Dans ce cadre compliqué, Emmanuel Macron, qui tente d’endosser le rôle de médiateur (il a reçu Vladimir Poutine, exclu du G8 en 2014 lundi), veut réformer ce format qu’il avait qualifié de « théâtre d’ombres et de divisions » après le précédent du sommet au Canada en 2018, marqué par un spectaculaire coup de sang de Donald Trump.
Il ne devrait donc pas y avoir de déclaration finale, exercice rendu trop ardu par les divergences béantes entre les membres sur les questions du climat, de la crise iranienne, de la crise migratoire, du Brexit, etc.
La présidence française tentera de favoriser l’émergence de « coalitions de pays acteurs » désireux de « proposer des solutions concrètes sur les grands défis », selon une source française, et plusieurs chefs d’Etat hors G7 sont invités. Outre M. Modi, le chilien Sebastian Piñera, l’égyptien Abdel Fattah al-Sissi, et plusieurs dirigeants africains comme Paul Kagame (Rwanda), Roch Marc Christian Kaboré (Burkina Faso) ou encore Macky Sall (Sénégal). En revanche le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker a annulé sa venue pour raison de santé.
« Le G7 a été créé comme un club de démocraties libérales (…) et les démocraties libérales ont encore quelque chose à apporter au monde et à la stabilité collective, la paix, et la sécurité » estime une autre source française, résumant la mission que tente d’accomplir Emmanuel Macron.
L’intitulé officiel du sommet est « la lutte contre les inégalités ».
Parmi les « grands défis » figure l’urgence climatique. « Tous les membres à l’exception des Etats-Unis vont s’engager à mettre en œuvre et accélérer l’accord de Paris sur le climat, soutenir le sommet des Nations Unies pour le climat en septembre, défendre la biodiversité », estime John Kirton, directeur du G7 research Group de l’université de Toronto.
Sur les questions économiques, les dirigeants pourraient valider les avancées réalisées mi-juillet par leurs ministres des Finances vers un accord sur la taxation des géants du numérique.
Mais comme souvent dans ce genre de réunion, le plus intéressant sera ce qui ne figure pas à l’agenda: l’imprévu, le langage corporel des leaders, qui rencontre qui en bilatéral, Boris Johnson va-t-il faire les yeux de Chimène à Donald Trump pour assurer ses arrières en cas de Brexit sans accord ? Le président américain sera-t-il aussi isolé que sur la désormais célèbre photo du G7 canadien où il apparaissait assis face aux autres dirigeants qui semblaient tenter de le convaincre ?