Italie: deuxième jour de consultations pour sortir de la crise

L’Italie s’est lancée jeudi dans un deuxième round de consultations pour chercher une solution à la crise déclenchée par l’explosion du gouvernement populiste formé par la Ligue de Matteo Salvini et le Mouvement 5 Etoiles en juin 2018.

Le président Sergio Mattarella, le maître des horloges qui a la clef du dénouement, continue ses entrevues avec les formations politiques dont les cinq principales ont commencé à défiler dans son palais du Quirinal.

La première à arriver, Frères d’Italie (ultra-droite post-fasciste), devrait réclamer des législatives anticipées, occasion de s’allier avec la Ligue du ministre de l’Intérieur et leader d’extrême droite Matteo Salvini, dont elle partage les idées souverainistes.

A l’issue de ce ballet, diverses options s’offriront au chef de l’Etat, dont un scrutin anticipé dès l’automne.

Cette perspective ne l’enchante guère car la troisième économie de la zone euro, très endettée et dont la croissance est à l’arrêt, devrait affronter au même moment la phase délicate d’élaboration du budget 2020.

Des mesures doivent impérativement être adoptées pour éviter une hausse automatique de la TVA l’an prochain, faute d’avoir auparavant comblé un trou budgétaire évalué à 23 milliards d’euros.

La crise italienne « se produit dans une phase critique pour l’Europe avec un risque de récession en Allemagne, l’installation d’une nouvelle Commission à Bruxelles et pourrait contribuer à détériorer sensiblement la confiance dans la zone euro », a estimé Andrea Montanino, chef économiste de la fédération patronale Confindustria.

Le scénario le plus probable est celui d’une nouvelle majorité.

La première formation de gauche, le Parti démocrate (PD), qui représente environ 20% des suffrages, a proposé dès mercredi une alliance au M5S, lâché par M. Salvini, le 8 août, après 14 mois de mariage.

Le M5S n’a pas répondu immédiatement, laissant planer le doute. Même si, compte tenu de son affaiblissement – il est tombé de 32% au printemps 2018 à environ 15/16 % – retourner aux urnes dès maintenant serait de l’ordre du suicide, selon les analystes.

Au Parlement toutefois, les Cinq Etoiles sont toujours « le premier parti » disposant d’une « majorité relative » sur laquelle bâtir un nouveau pacte de gouvernement.

Le PD de Nicola Zingaretti a posé cinq conditions pour un mariage de l’ensemble de la gauche avec le M5S, mouvement fondé sur le rejet de la vieille classe politique et de la corruption mais traversé de courants disparates, dont une forte tendance eurosceptique.

Outre « une appartenance loyale à l’Europe », le respect de la « centralité du Parlement », une croissance respectueuse de l’environnement, un changement de cap radical dans la gestion des migrations et un virage économique vers davantage de redistribution et d’investissements, le PD exige que le prochain exécutif ne soit pas dirigé par le Premier ministre sortant Giuseppe Conte.

Très populaire en Italie (avec une cote de 54 % en juillet) et poussé par les Cinq Etoiles qui le considèrent comme un « serviteur de la Nation dont l’Italie ne peut se passer », M. Zingaretti lui reproche d’avoir accepté sans sciller pendant ses 14 mois de mandat les diktats anti-migrants de Salvini.

D’autres noms circulent: ceux du président de la Chambre des députés, Roberto Fico du M5S, de l’ancien juge anti-corruption Raffaele Cantone ou bien, pour la première fois en Italie, celui d’une femme.

Pour favoriser l’union PD-M5S dont il a eu l’idée, l’ex-Premier ministre Matteo Renzi – qu’une bonne partie des Cinq Etoiles détestent – a déjà dit qu’il resterait en retrait.

Une autre hypothèse verrait la formation d’une majorité extra-large et pro-européenne, rassemblant la gauche et la droite, à la manière des coalitions allemandes.

L’ancien président de la Commission européenne Romano Prodi, ex-Premier ministre, a proposé un tel gouvernement « Ursula », du nom de la nouvelle présidente de la Commission de Bruxelles, l’Allemande Ursula von der Leyen.

L’exécutif pourrait être élargi à Forza Italia, le parti de centre-droit de Silvio Berlusconi, pratiquement moribond, mais qui peut offrir de précieux sièges parlementaires.

Le « Cavaliere », qui a réuni son état-major mercredi soir, a toutefois entendu les menaces de son ex-allié Matteo Salvini de l’exclure de tout futur pacte gouvernemental, et a fait savoir qu’il demanderait comme M. Salvini un retour immédiat aux urnes.