La Bosnie devra indemniser une femme violée pendant la guerre des années 1990 faute de versements par le coupable, une décision de l’ONU qualifiée de «révolutionnaire» par l’ONG suisse TRIAL International qui l’a rendue publique.
Un tribunal de Sarajevo avait condamné en 2015 un militaire serbe de Bosnie à huit ans de prison et à payer 15.000 euros de dommages pour ce viol considéré comme un crime de guerre. Plus de 20.000 femmes, essentiellement bosniaques musulmanes, ont été violées pendant la guerre intercommunautaire de Bosnie (1992-95), un conflit qui a fait 100.000 morts. Seulement un millier d’entre elles reçoivent une pension, symbolique, en tant que victimes civiles de la guerre.
Dans ce cas, malgré la condamnation, la victime n’a rien perçu: le coupable était insolvable et l’Etat bosnien avait estimé qu’il n’avait pas à s’acquitter de ce dédommagement en raison des délais de prescription, selon un communiqué de TRIAL, diffusé à Sarajevo. La victime avait alors saisi le Comité contre la torture (CAT) de l’ONU qui a demandé à l’Etat bosnien de faire en sorte que la plaignante «obtienne une indemnisation immédiate, juste et adéquate», selon TRIAL International.
L’Etat devra aussi lui assurer «une assistance médicale et psychologique gratuite» et lui «présenter publiquement des excuses», selon cette décision publiée sur le site de Trial. Sollicité par l’AFP, le CAT n’a pas répondu dans l’immédiat. «Nous considérons cette décision comme révolutionnaire, non seulement au niveau de notre pays, mais à l’échelle globale», a déclaré Adrijana Hanusic Becirovic, conseiller juridique de Trial International, citée dans le communiqué.
Les autorités bosniennes sont aussi exhortées à mettre en place un système d’indemnisation des victimes des crimes de guerre, dont les victimes des viols. Depuis 2015, d’anciens soldats reconnus coupables de viols sont condamnés à payer des dédommagements à leur victime. Quinze verdicts ont été prononcés à ce jour, avec des dédommagements d’environ 10.000 à 15.000 euros, selon Trial.