Alain Juillet a livré un sévère réquisitoire sur les pratiques de Nicolas Sarkozy et de ses proches en Libye

Bien avant 2011, le renseignement français avait entendu parler d’un possible financement libyen en faveur des équipes de Nicolas Sarkozy, a certifié devant un juge l’ex-directeur de la DGSE, Alain Juillet, cité par Mediapart.

Interrogé fin juin dans le cabinet du juge Tournaire, l’ancien directeur de la DGSE, puis responsable de l’intelligence économique à Matignon, Alain Juillet a livré un sévère réquisitoire sur les pratiques de Nicolas Sarkozy et de ses proches en Libye, allant jusqu’à les comparer à un «milieu de voyous», rapporte Mediapart.

Selon lui, bien avant les déclarations de Saïf al-Islam en 2011, le renseignement français était au courant d’échos insistants sur un possible soutien financier libyen aux équipes de Nicolas Sarkozy au moment de la campagne présidentielle de 2007.L’ex-Président de la République est mis en examen depuis mars 2018 pour «corruption passive», «financement illicite de campagne électorale» et «recel de détournement de fonds publics», tandis que l’ancien secrétaire général de l’Élysée, puis ministre de l’Intérieur, Claude Guéant a écopé de près d’une dizaine de mises en examen, dont une pour «corruption», rappelle le portail.

«Rencontres troublantes»

Par ailleurs, l’enquête a montré que deux lieutenants de Sarkozy, Claude Guéant et Brice Hortefeux, avaient par deux fois rencontré secrètement en 2005 à Tripoli Abdallah Senoussi, soupçonné d’être l’un des acteurs de la corruption reprochée au clan Sarkozy et condamné en 1999 par contumace dans le procès de l’attentat contre l’avion de ligne DC-10 de la compagnie UTA.

«Ces rencontres sont troublantes. […] Là, on n’est plus dans la politique, on est dans le milieu des voyous», a confié Alain Juillet devant le juge Tournaire.

Toujours d’après l’enquête judiciaire, durant ces deux rendez-vous secrets de Guéant et Hortefeux avec Senoussi, qui ont eu lieu en septembre et décembre 2005, un financement occulte à l’occasion de la prochaine campagne présidentielle a pu être discuté et préparé.Alain Juillet a tenu à souligner que tous ces agissements du cabinet de Sarkozy «étaient inconnus» de Matignon.

Tente de Kadhafi à Paris

Pour M.Juillet, «d’autres choses curieuses ont attiré l’attention» sur les relations particulières qu’entretenaient les dirigeants français et libyen, comme l’accueil fait en décembre 2007 à Mouammar Kadhafi qui a pu planter sa tente à Paris:

«On n’a jamais vu quelque chose de pareil dans la République. Ce qui se disait, c’est que Kadhafi avait payé une partie de la campagne de Nicolas Sarkozy», a-t-il fait valoir.