Au cours des jours qui ont précédé sa conversation téléphonique avec le Président ukrainien, Donald Trump a demandé à son chef d’état-major de bloquer près de 400 millions de dollars d’aide militaire destinés à l’Ukraine, écrit le Washington Post le 23 septembre, citant de hauts responsables de l’administration.
Le Président états-unien a ordonné à son chef d’état-major Mick Mulvaney de suspendre quelque 400 millions de dollars d’aide militaire destinés à Kiev au moins une semaine avant sa conversation téléphonique avec Vladimir Zelensky, rapporte le Washington Post, qui se réfère à trois hauts responsables de l’administration. Lors de cet appel, qui a eu lieu le 25 juillet, Donald Trump a fait pression sur son homologue ukrainien pour qu’il enquête sur le fils de l’ancien vice-Président Joe Biden, avance la presse.
Des responsables du Bureau de la gestion et du budget ont transmis l’ordre de Trump au Département d’État et au Pentagone lors d’une réunion interorganismes à la mi-juillet, à en croire des responsables qui ont parlé au Washington Post sous réserve de garder leur anonymat pour débattre des délibérations internes. Ils ont expliqué que le Président avait des «préoccupations» et voulait réfléchir avant de dépenser l’argent.Les responsables de l’administration ont été priés d’indiquer aux législateurs que les retards faisaient partie d’un «processus interorganismes» sans leur donner d‘information supplémentaire, précise le Washington Post.
Quelles en seraient les raisons?
L’ordre de Donald Trump de suspendre l’aide prévue à l’Ukraine une semaine avant son entretien «est susceptible de soulever des questions sur les origines de sa décision et d’alimenter les soupçons au Capitole selon lesquels Trump aurait cherché à profiter de l’aide approuvée par le Congrès pour nuire à un rival politique», précise le journal.
Selon un haut responsable de l’administration, la décision de Trump de suspendre les fonds résulte de ses préoccupations sur le fait qu’il y a «beaucoup de corruption en Ukraine» et que sa détermination à débloquer l’argent est motivée par la fin de l’année budgétaire qui arrive le 30 septembre.
L’administration s’inquiétait du fait qu’il puisse avoir des démêlés avec la justice s’il ne dépensait pas cet argent, souligne le responsable, précisant que Trump a finalement débloqué l’argent. L’interlocuteur du Washington Post a nié tout lien entre le blocage de l’aide et la pression exercée sur Zelensky:
«Cela n’a rien à voir avec une contrepartie», a dit le responsable.
Pourtant, au Capitole, les démocrates ont appelé à ouvrir une enquête sur ce qu’ils considèrent être une «extorsion de fonds» potentielle, comme l’a dit le sénateur Robert Menendez de la Commission des relations internationales. D’après lui, le locataire de la Maison-Blanche essaie de «remodeler la politique étrangère américaine» en vue d’avancer sur ses objectifs personnels et politiques.
«Je ne pense pas que ça aurait été un problème si le Président avait dit explicitement aux Ukrainiens qu’ils ne recevraient pas d’aide en matière de sécurité s’ils n’intervenaient pas dans les élections de 2020 », a déclaré le sénateur Chris Murphy.
«Il y a une menace implicite dans chaque demande faite par un Président des États-Unis à une puissance étrangère… Ce pays étranger sait que s’il ne le fait pas, il y aura probablement des conséquences».
Trump nie toute pression
Donald Trump a toutefois farouchement nié le 23 septembre avoir fait pression sur l’Ukraine pour tenter de nuire à son rival politique Joe Biden, ancien vice-président de Barack Obama, favori de la primaire démocrate et donc l’un de ses sérieux rivaux potentiels pour la présidentielle de 2020.«Joe Biden et son fils sont corrompus», a dénoncé M.Trump, reprenant des rumeurs non étayées concernant une affaire présumée de corruption en Ukraine, et des pressions sur un procureur.
«Si un républicain avait dit ce que Joe Biden a dit, il aurait eu droit à la chaise électrique immédiatement», a poursuivi le Président.
La veille, le Président états-unien avait toutefois confirmé avoir parlé cet été à son homologue ukrainien Vladimir Zelensky de cette affaire présumée, mentionnant explicitement Joe Biden et son fils Hunter, qui travaille pour un groupe gazier ukrainien à partir de 2014.