La Chine s’apprête à célébrer en grande pompe le 70e anniversaire du régime communiste, apothéose annoncée du président Xi Jinping en dépit des vents contraires soufflant de Hong Kong et Washington.
Pékin devrait voir passer mardi 1er octobre le plus grand défilé civil et militaire jamais organisé par le pays le plus peuplé du monde. Objectif: faire vibrer la fibre patriotique d’une nation devenue en 70 ans la deuxième économie mondiale après des décennies de guerre, de misère et d’humiliation.
Le défilé doit aussi présenter les derniers armements de l’armée chinoise, dont la présence est parfois perçue avec inquiétude par ses voisins, notamment les pays riverains de la mer de Chine méridionale.
Mais l’unité du géant asiatique est battue en brèche ces derniers mois par une agitation sans précédent à Hong Kong depuis la restitution de la colonie britannique à la Chine en 1997.
Les contestataires pro-démocratie ont déjà prévu de gâcher la fête en appelant à manifester le 1er octobre et les autorités du territoire autonome ont annulé le feu d’artifice prévu par crainte de nouvelles violences.
Quant à la puissance économique chinoise, elle est menacée depuis l’an dernier par la guerre commerciale lancée par le président américain Donald Trump, qui a imposé des droits de douane punitifs aux produits de Pékin.
Sans compter les critiques internationales qui s’abattent sur la Chine pour sa politique au Xinjiang, une région du nord-ouest à majorité musulmane, où un million de personnes ont été internées au nom de la lutte contre le terrorisme, selon des organisations de défense des droits de l’Homme.
De 40 à 70 millions de morts
En dépit de ces revers, Xi Jinping sera le héros incontesté des cérémonies commémorant la proclamation de la République populaire par son lointain prédécesseur Mao Tsé-toung, le 1er octobre 1949.
Mardi, Xi passera les troupes en revue et prononcera « un important discours », selon les médias officiels.
Nombre de commentateurs estiment que l’actuel président est le plus puissant dirigeant chinois depuis Mao, qui a plongé le pays dans le chaos du « Grand bond en avant » et de la « Révolution culturelle ».
En 1997, « Le Livre noir du communisme », un ouvrage rédigé par un collectif d’universitaires, estimait entre 40 et 70 millions de morts le bilan du régime chinois, compilant le nombre de victimes des purges, de la famine consécutive au « Grand bond en avant » et plus récemment de la répression de Tiananmen en 1989.
Les réformes économiques lancées après la mort de Mao en 1976 ont propulsé le pays au sommet de l’économie mondiale.
Mais l’impressionnante croissance du pays, sans exemple dans l’histoire, montre des signes de faiblesse: elle est tombée cette année à son rythme le plus faible depuis près de trois décennies, à mesure que les coûts de production se rapprochaient de ceux de l’Occident.
De façon plus immédiate, l’envolée des prix du porc, provoquée par une épidémie de peste porcine africaine, pèse sur le niveau de vie des consommateurs chinois, friands de cet aliment.
Cerfs-volants interdits
Le Parti communiste chinois (PCC) reste malgré tout fermement au pouvoir: depuis son arrivée aux affaires fin 2012, Xi Jinping a étouffé tout espoir de réforme politique et renforcé la surveillance des citoyens via des centaines de millions de caméras et une « Grande muraille de l’internet » qui filtre les informations venues de l’extérieur.
A l’approche du 1er octobre, les mesures de sécurité ont encore été resserrées à Pékin: bars, restaurants et commerces ont été fermés dans certains quartiers plusieurs semaines à l’avance. Dans toute la ville, la vente des pistolets factices est interdite ainsi que l’usage des cerfs-volants.
Chaque weekend depuis le début du mois, les répétitions du défilé le long de l’immense avenue de la Paix éternelle ont mis le centre de la capitale en état de siège. Des entreprises, à commencer par les médias étrangers, ayant vue sur l’avenue, ont reçu l’ordre de quitter les lieux.
Des centaines de milliers de fonctionnaires et d’étudiants défileront aussi mardi face aux dirigeants du pays rassemblés sur la porte de la Paix céleste, face à l’immense place Tiananmen.
Lors de répétitions nocturnes, ces derniers ont reçu… des couches, toute pause pipi étant interdite, a expliqué un participant au quotidien Global Times.