Au moins quatre manifestants ont été tués, vendredi, à Bagdad, lors d’une nouvelle journée de mobilisation en Irak. Après plus de deux mois et demi de contestation, la plus haute autorité chiite a appelé à modifier la loi électorale. Une proposition loin de satisfaire les Irakiens, qui réclament un changement radical.
Quatre manifestants ont été tués, vendredi 22 novembre, dans des heurts avec les forces de l’ordre sur des ponts menant à d’importantes institutions de Bagdad, lors d’une nouvelle journée de mobilisation en Irak. Malgré la contestation qui agite le pays depuis plus de deux mois et demi, la seule proposition des autorités chiites est une réforme de la loi électorale qui ne convainc pas les manifestants. Ces derniers réclament une refonte du système politique, une purge des « corrompus » et une classe dirigeante entièrement renouvelée.
Vendredi, dans la rue Rachid et aux abords de trois ponts reliant la place Tahrir, épicentre de la contestation, trois manifestants ont été tués, deux par balles et un troisième par une grenade lacrymogène des forces de l’ordre, et 30 blessés, selon des sources médicales. L’utilisation de ces grenades est dénoncée car elles sont de type militaire. Depuis le début du mouvement, au moins 340 personnes ont été tuées.
Depuis le début du premier mouvement social spontané d’Irak, le 1er octobre, plus de 15 000 personnes ont été blessées à Bagdad et dans le sud du pays.
Dans son prêche hebdomadaire, le grand ayatollah Ali Sistani, figure tutélaire de la politique irakienne qui a récemment apporté un soutien de poids aux revendications des manifestants sans toutefois retirer sa confiance aux dirigeants, est revenu sur la réforme de la loi électorale.
Il a estimé que voter une telle réforme était la priorité pour sortir de la « grande crise ». Le système électoral irakien, l’un des plus complexes au monde, est accusé de favoriser les grands partis et surtout leurs têtes de liste et d’empêcher l’arrivée de nouveaux venus et d’indépendants.
Mais le projet de loi soumis par le gouvernement d’Adel Abdel Mahdi au Parlement ne semble pas répondre aux exigences de renouvellement des manifestants mais aussi de l’ONU qui a réclamé des « améliorations » de ce texte, toujours pas soumis à la première lecture du Parlement.
« De nouvelles élections ne changeront rien : on va revoir les mêmes têtes et le même gouvernement », a balancé d’un revers de main Ahmed Mohammed, un manifestant sur Tahrir. Car sur cette place, lois et amendements constitutionnels sont loin de satisfaire les Irakiens qui réclament un changement radical.
« Les dirigeants ont perdu toute légitimité, leurs propositions ne nous représentent pas. On veut que le gouvernement démissionne », s’est emporté Abou Ali, un manifestant de 32 ans.
Autour de lui, les manifestants occupent jour et nuit l’emblématique place Tahrir et ont repris leurs campements sur trois ponts – al-Joumhouriya, Senek et al-Ahrar – qui mènent à la très sécurisée Zone verte où siègent le Parlement et l’ambassade des États-Unis, ainsi qu’aux bureaux du Premier ministre et à l’ambassade d’Iran.
Le grand voisin iranien est conspué et son drapeau brûlé en place publique par des Irakiens qui voit en lui l’architecte du système politique rongé par la corruption et le clientélisme.
Au sud de Bagdad, d’importantes manifestations bloquent une nouvelle fois les villes de Hilla, Nassiriya, Diwaniya, Najaf et Kerbala.
« Nous sommes déterminés à poursuivre la mobilisation jusqu’à la démission du gouvernement et la dissolution du Parlement », a lancé Nassir al-Qassab, un dignitaire tribal qui manifeste à Kout. « Nous rejetons ces propositions du gouvernement, il nous ment et cherche à gagner du temps. »