Le président ukrainien s’est rendu vendredi sur le front dans l’est de l’Ukraine, à trois jours de sa première rencontre avec Vladimir Poutine pour relancer les pourparlers de paix sur le seul conflit armé actif d’Europe.
Ce rendez-vous à Paris, sous parrainage franco-allemand, intervient après trois ans de paralysie des négociations au plus haut niveau.
Les regards seront rivés sur Volodymyr Zelensky, un ancien acteur devenu président de l’Ukraine en mai sans expérience politique, qui fera face au vétéran qu’est Vladimir Poutine.
Si personne n’attend de percée dès lundi, la reprise des discussions est vue avec optimisme, tant le président français Emmanuel Macron, avec la chancelière allemande Angela Merkel, a bataillé pour raviver la mise en oeuvre des accords de paix de Minsk datant d’il y a environ cinq ans.
La tâche sera difficile pour M. Zelensky, qui est pris entre une promesse de ne pas « capituler » face à Moscou et son souhait de mettre fin rapidement au conflit.
Ses opposants l’ont mis en garde contre toute concession majeure. Et son prédécesseur Petro Porochenko l’a prévenu qu’il ne fallait « pas faire confiance à Poutine, jamais ».
Volodymyr Zelensky est allé, lui, rendre visite à ses troupes vendredi sur le front. « C’est plus facile de négocier en ressentant votre force et votre soutien », a-t-il lancé depuis la localité de Chasiv Yar, vêtu d’une tenue de camouflage.
Plus tôt dans la semaine, il avait jugé que l’organisation de pourparlers était « une première victoire », alors que la guerre entre Kiev et des séparatistes prorusses a fait plus de 13.000 morts en plus de cinq ans.
L’Occident et l’Ukraine accusent Moscou de financer et d’armer les rebelles, ce que la Russie nie, affirmant jouer un rôle politico-humanitaire pour protéger les populations locales.
Les négociations à Paris, un format baptisé « Normandie », vont se concentrer sur le contenu des accords de Minsk: cessez-le-feu immédiat, retrait des armes lourdes, restauration du contrôle de Kiev sur la frontière avec la Russie, autonomie accrue pour les territoires sous contrôle séparatiste.
Si ce texte a mis fin aux combats les plus graves, les aspects politiques n’ont jamais avancé.
Depuis le changement de président en Ukraine, une certaine détente se fait sentir: un échange de 70 prisonniers, dont des figures très symboliques, a pu avoir lieu, les troupes des belligérants ont reculé dans trois petits secteurs de la ligne de front et des navires de guerre ukrainiens saisis par la Russie ont été rendus.
Vladimir Poutine a par ailleurs dépeint son homologue comme « sincère » et « sympathique ».
Volodymyr Zelensky a dit vouloir que les pourparlers de Paris se focalisent sur trois points : un nouvel échange de prisonniers, la mise en oeuvre d’un cessez-le-feu durable, et le démantèlement de tout groupe armé « illégalement » en territoire ukrainien. Comprendre les séparatistes prorusses et leurs parrains russes.
Mais il va faire face au président russe alors que son alliance clé avec Washington est fragilisée par le scandale qui vaut au président Donald Trump une procédure de destitution.
Ce dernier est suspecté d’avoir fait un chantage à l’aide militaire à Kiev dans le but d’écarter un rival en vue de la présidentielle de 2020.
Vladimir Poutine est pour sa part plus circonspect sur ses intentions, même si à Moscou la priorité est d’avancer sur la question de l’autonomie et de la tenue d’élections dans les régions séparatistes de Donetsk et Lougansk.
Son porte-parole Dmitri Peskov a évoqué l’adoption d’un éventuel « document non-contraignant » à l’issue du sommet.
Pour Emmanuel Macron, la rencontre sera aussi l’occasion d’évaluer les chances de son ambition de relancer des relations russo-européennes, quasi-paralysées après les événements de 2014.
Un autre sujet qui pourrait être abordé est la question du transit du gaz russe via l’Ukraine vers l’Europe, afin d’éviter une coupure des approvisionnements au Nouvel An.