Cette étude annuelle est menée par l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) et l’Insee. Elle a été publiée jeudi 12 décembre.
Il s’agit d’une étude de victimation. Autrement dit, un échantillon de la population a été interrogé pour savoir si au cours des deux dernières années ils ont été victimes d’un vol, d’une agression, d’une escroquerie, s’ils ont porté plainte… Par rapport aux études basées sur les seuls procès-verbaux des gendarmes et policiers, cette méthode permet donc d’avoir une vue plus globale de la délinquance.
Cette tendance concerne principalement les atteintes aux biens. En 2018, 198 000 ménages ont été victimes d’un vol ou d’une tentative de vol de voiture. C’est deux moins qu’il y a treize ans. Le nombre de cambriolages (et tentatives) est également en baisse : 557000 en 2018. C’est mieux qu’en 2017 (624 000), mais leur nombre reste très supérieur à l’année 2008, où 386 000 cambriolages et tentatives avaient été enregistrés. C’est ce qui ressort de l’étude annuelle.
Autre tendance « positive » : les vols avec violence diminuent aussi fortement. En 2018, près de 166 000 personnes ont déclaré avoir été victimes d’un tel vol. Un chiffre divisé par presque trois en douze ans
, note Christophe Soullez, responsable de l’ONDRP.
À l’inverse, les violences physiques (hors ménage) sont reparties à la hausse depuis deux ans : 710 000 victimes en 2018 (contre 610000 en 2016). Une grande majorité de ces violences n’entraîne pas d’incapacité totale de travail (ITT) : Il s’agit de bousculades, de gifles, de coups aussi mais qui n’occasionnent pas de blessures physiques importantes
, nuance Christophe Soullez.
L’étude précise, par ailleurs, qu’en moyenne, de 2011 à 2018, 176 000 personnes âgées de 18 à 75 ans ont été victimes de violences sexuelles (hors ménage) : principalement des femmes. Seules 13 % portent plainte. Au sein des couples, ce sont 295 000 personnes, en moyenne par an, qui déclarent être victimes de violences physiques et/ou sexuelles : à 72 %, il s’agit de femmes ; à 28 % de jeunes de 18 à 29 ans.
C’est un peu une surprise. L’étude tend à démontrer que le sentiment d’insécurité qui cristallise le débat politique depuis 1990, est relativement stable depuis 2007. En 2019, 11 % des personnes de plus de 14 ans (5,9 millions de personnes) ont déclaré se sentir en insécurité dans leur quartier ou village. Il y en avait 5,5 millions en 2007 et 6 millions en 2013.
Des différences subsistent toutefois en fonction de son lieu d’habitation et de sa condition sociale. Ce sentiment d’insécurité est plus faible en Bretagne et en Auvergne-Rhône-Alpes que dans les Hauts-de-France et le Grand Est. Il est plus marqué chez les femmes que chez les hommes ; chez les chômeurs que chez les étudiants et salariés. Le sentiment d’insécurité s’est développé parmi les individus qui se sentent fragilisés par la société actuelle. Ils développent une haine contre tout ce qui représente un désordre dans la société. Leur insécurité peut être professionnelle, financière, sociale… Mais c’est la délinquance qui cristallise cette insécurité
, précise Philippe Robert, directeur de recherches émérite au CNRS.
Dernier constat : 61 % des personnes interrogées se déclarent satisfaites ou très satisfaites par l’action des policiers et gendarmes. Si ce pourcentage est stable par rapport à 2018, le lien de confiance entre population et forces de l’ordre s’est distendu. Et cette tendance est ancienne. Les manifestations des Gilets jaunes ont sans doute contribué à accentuer cette défiance (NDLR : l’étude a été réalisée début 2019). Et la police de sécurité du quotidien (lancée en février 2018) n’est pas parvenue à rapprocher police et population
, observe Guillaume Farde, professeur à Sciences Po et spécialiste des questions de sécurité. Et ce, d’autant plus que les policiers eux-mêmes déplorent des conditions de travail qui se dégradent.