Née de la rencontre d’influences chrétiennes, musulmanes et juives, l’université de médecine de Montpellier, une des plus anciennes du monde, célèbrera en 2020 ses 800 ans, avec l’ambition de perpétuer la transmission de son héritage humaniste.
« On retrouve à l’origine de l »Universitas medicorum’ de Montpellier en 1220 une coexistence unique entre des médecins et hommes de savoir chrétiens, arabes et juifs », qui ont traduit l’héritage grec, explique à l’AFP Michel Mondain le doyen de l’actuelle faculté de médecine.
« La richesse de ce multiculturalisme a engendré une grande tolérance et une réflexion très large sur ce qu’est l’homme », ajoute-t-il: « Ca mérite d’être rappelé dans le contexte actuel de montée du populisme ».
Cette « dimension humaniste », cette « curiosité scientifique associée à un profond sens de l’éthique » a perduré au fil de huit siècles d’enseignement continu et reste à ses yeux le fondement de ce qui doit être transmis aux étudiants d’aujourd’hui.
A Montpellier, alors au croisement des civilisations orientales et occidentales et point médian entre les péninsules italienne et ibérique, le seigneur Guilhem VIII a accordé en 1181 le droit d’exercer et d’enseigner la médecine. Mais il faut attendre le 17 août 1220 pour que le légat apostolique du pape concède à « l’universitas medicorum » ses premiers statuts, marquant la naissance officielle de l’une des plus anciennes universités de médecine du monde.
Des universités naissent alors à quelques années d’intervalle à Paris, Bologne, Montpellier et Oxford, rappelle le Professeur Gérald Chanques, secrétaire général et porte-parole du comité des 800 ans.
L’enseignement de la médecine à Montpellier s’inspire alors de celui développé depuis le Xe siècle à Salerne (Italie). Il est fondé sur le corpus hippocratique: « Jadis Hippocrate était de Cos (son île natale, NDLR), maintenant il est de Montpellier » ou « Olim Cous nunc Monspeliensis Hippocrates » en version originale, proclame fièrement une plaque dans la salle des actes du bâtiment historique de la faculté de médecine, où les étudiants soutiennent leur thèse.
Dans l’ancien évêché, qui reste un lieu d’enseignement, les étudiants sont accueillis par le premier aphorisme d’Hippocrate « L’art est long ! » et peuvent voir les portraits de leurs illustres prédécesseurs parmi lesquels Rabelais, Nostradamus ou Gui de Chauliac, considéré comme le père de la chirurgie médicale.
Ils peuvent aussi profiter d’un patrimoine architectural, artistique, muséographique et scientifique inestimable: 11.000 pièces anatomiques, plusieurs centaines de manuscrits médiévaux, plusieurs dizaines de manuscrits carolingiens, 100 000 volumes imprimés dans tous les domaines du savoir et un remarquable Jardin des Plantes élaboré sous l’impulsion de Henri IV.
Parmi les trésors méconnus mais pourtant accessibles au grand public dans le bâtiment historique, au sein du Musée Atger, figure un cabinet d’un millier de dessins originaux de maîtres italiens, français et flamands des XVIe au XVIIIe siècles, dont une trentaine de Tiepolo et des Fragonard.
Aujourd’hui, l’université accueille en première année 3 000 étudiants, dont beaucoup ne termineront pas le long cursus de médecine, plus de 3 000 en 2e cycle et internes et un peu moins de 3.000 en formation continue. Depuis 2017, ils bénéficient d’un campus à la pointe de la technologie, adossé au CHU de Montpellier.
Au fil de l’année du huitième centenaire, ce mélange de tradition et d’innovation sera célébré à travers de nombreux événements.
Parmi eux, du 28 juin au 31 mai, une exposition croisée de dessins de corps et de visages des musées montpelliérains Atger et Fabre et en mars une exposition consacrée à l’Ecossaise Agnès McLaren, qui en 1878 devint la première femme diplômée de la faculté de médecine de Montpellier.
En juin, Montpellier accueillera également une réunion du groupe de Coimbra, premier réseau européen d’universités et en septembre un colloque international des grands éditeurs scientifiques internationaux comme The Lancet, Nature ou Science.