Vladimir Poutine a gardé son image de sauveur de la Russie

Il y a vingt ans, le soir du Nouvel an, un président Boris Elstine à bout de souffle démissionne. Le pâle Vladimir Poutine qui lui succède va redresser l’ex-empire soviétique à la dérive. À sa manière.

Économie qui stagne, scandales écologiques en pagaille, liberté très encadrée, médias aux ordres… Le tableau de la Russie de Vladimir Poutine n’est guère flatteur, vu d’Occident. Pourtant, vingt ans après son accession au pouvoir, le président russe, 67 ans, reste incontesté chez lui, le plus populaire des politiques dans toutes les enquêtes d’opinion.

Pour comprendre, il faut revenir à cette nuit de la Saint-Sylvestre 1999. Alors que l’Occident bascule joyeusement dans un nouveau millénaire, la fête a un goût de cendres pour les Russes. Huit ans après la dissolution de l’URSS, l’ex-empire soviétique est au fond du trou.

La richesse produite (PIB) et la production industrielle ont été divisées par deux ; le rouble ne vaut plus rien ; dans l’ex-patrie communiste de l’emploi garanti, le chômage officiel atteint 15 % ; bien davantage peinent à se nourrir. C’est l’époque où sur les trottoirs de Moscou, des Russes de tous âges installent des étals pour vendre tout ce qu’ils possèdent : des chaussettes tricotées maison aux bijoux de famille…

Dans ce contexte, la démission surprise du président Elstine, en plein discours de vœux à la télé, est une bonne nouvelle pour une majorité. Le flamboyant Boris de 1991, qui empêche un putsch militaire en grimpant sur un tank, n’est plus qu’un président alcoolique et honni. Il a livré le pays à une poignée d’oligarques, souvent d’ex-cadres du régime communistes qui se sont bâti des fortunes à coups de monopole et qui ont davantage de pouvoir que les ministres.

Boris Elstine laisse les clés du camion Russie à son Premier ministre Vladimir Poutine qui, le même soir, lâche cette phrase :  Je vous promets qu’il n’y aura aucun vide du pouvoir, pas une seule minute ! 

Restaurer l’autorité de l’État et  la verticale du pouvoir  sur ce qui reste de l’immense pays aux onze fuseaux horaires : c’est l’obsession des premières années Poutine, pas pour rien ancien espion du KGB soviétique et ancien patron du FSB, successeur du KGB.

Les rebelles tchétchènes, les satrapes locaux, les oligarques… Tous sont mis au pas. Les premiers avec des bombes, les seconds avec des purges et des condamnations pour corruption, les troisièmes en étant priés de laisser la place à des proches du nouveau tsar… Ceux qui résistent sont contraints à l’exil comme Berezovky ou emprisonné comme Khodorkoski.

Au capitalisme sauvage des années Eltsine, succède un capitalisme d’État, où les ministres sont aussi les patrons des grandes entreprises publiques.

Lassés par les années d’anarchie, les Russes approuvent le nouvel ordre poutinien, d’autant que l’économie s’est redressée spectaculairement. Poutine a la baraka. Son accession au pouvoir coïncide avec l’envolée des cours des métaux et surtout du pétrole, qui assurent 82 % des exportations et 40 % des recettes de l’État en 2005 !

Les Russes ne sont plus obligés de mendier ; les classes moyennes peuvent partir en vacances à l’étranger. La crise mondiale de 2008 et le reflux des cours a mis fin à l’euphorie. Mais les inépuisables ressources naturelles de la Russie laissent de la marge au maître du Kremlin.