Sourdes tensions au début du procès en destitution de Trump

« Ses mensonges nous divisent ». En ce mardi glacial, un homme, seul, brandit une pancarte devant le Congrès américain, où les sénateurs s’apprêtent à entamer le procès historique en destitution de Donald Trump.

Dans l’enceinte du Capitole, le slogan prend tout son sens, élus et touristes affichant des lectures diamétralement opposées des poursuites intentées contre le président des Etats-Unis.

Un de ses partisans, qui avait planifié sa visite sans connaître le calendrier des débats, refuse de parler d’un jour historique. C’est « une mascarade! Heureusement, ça ne devrait pas traîner », glisse-t-il sans donner son nom.

Tim Boyer n’avait pas davantage prévu de découvrir l’imposant Capitole en ce jour « particulier ». « Je ne m’attends pas à un procès équitable, mais j’espère que les sénateurs feront ce qu’ils ont à faire… »

A la mi-journée, les cent élus de la chambre haute, qui ont juré la semaine dernière de juger le président « avec impartialité », ont convergé vers l’hémicycle bleu et or où le procès doit se dérouler.

Interpellée par l’AFP, la sénatrice républicaine Shelley Moore Capito admet qu’il y a des tensions dans l’air: « c’est une affaire grave! ».

Contrairement aux sessions habituelles, les élus ont été sommés d’abandonner leurs téléphones et ordinateurs portables. « Je vais peut-être souffrir d’un petit manque au début, mais ça devrait aller », plaisante-t-elle, en se disant prête à tenir « le temps qu’il faudra ».

Dans l’hémicycle, les sénateurs échangent des poignées de main. Leur ballet dessine clairement deux camps: les républicains saluent les défenseurs du président, installés à une table en demi-cercle qui leur fait face; dans l’autre moitié de la salle, les démocrates échangent avec leurs confrères de la Chambre des représentants venus porter l’accusation contre Donald Trump.

Peu d’élus franchissent la travée centrale pour saluer un membre de l’autre camp.

Trois petits coups de marteau, donnés par le président de la Cour suprême des Etats-Unis John Roberts, chargé de présider les débats, résonnent. Un haut gradé chargé du protocole appelle à garder le silence « sous peine d’emprisonnement ».

Les sénateurs se figent sur leur siège, la plupart stylo en main pour prendre des notes.

Au balcon, le public continue d’arriver au compte-gouttes, ralenti par les contrôles de sécurité renforcés pour cette journée historique.

Avec le ton monocorde qui le caractérise, Mitch McConnell, le leader de la majorité républicaine, prend brièvement la parole pour préciser que la séance servira à fixer les règles du jeu du procès.

Pat Cipollone, l’avocat de la Maison Blanche, s’approche du micro. Cet homme discret, pas plus habitué aux prétoires qu’aux caméras, se dit « fier » de représenter Donald Trump.

« Il est temps que ce procès commence », les débats vont démontrer que « le président n’a rien fait de mal », assène-t-il d’emblée, sans s’étendre plus avant.

Le démocrate Adam Schiff se fait lui lyrique pour enjoindre aux sénateurs de respecter leur serment d’impartialité. « Nous pensons que le président mérite d’être destitué » parce qu’il a demandé à l’Ukraine d’enquêter sur un de ses rivaux, argumente-t-il.

Mais « la plus importante question aujourd’hui est de savoir si le président et les Américains verront un procès équitable », lance-t-il.

Son but? Convaincre quatre des 53 sénateurs républicains de faire défection et de voter avec les 47 sénateurs démocrates pour obtenir de nouveaux documents et témoins. Sinon « ce sera une parodie de procès », met-il en garde.

Face à lui, les mains croisées sur le ventre, Mitch McConnell ne bouge pas d’un iota. Le stratège assure avoir les voix nécessaires pour faire adopter une résolution qui devrait permettre de mener le procès au pas de charge et d’acquitter le président au plus vite, peut-être d’ici deux semaines.

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