Une entreprise norvégienne a traîné l’État norvégien devant la justice lundi, estimant avoir subi d’importants préjudices économiques en Russie après que les services secrets du pays nordique eurent maladroitement tenté, selon elle, de recruter des informateurs dans ses rangs, rapporte l’AFP.
Le producteur de béton Jelen Betong reproche aux services de renseignement intérieur (PST) et extérieur (E-tjenesten) d’avoir contacté deux employés dans les années 2010 afin d’en faire des informateurs dans la région de Mourmansk (nord-ouest de la Russie), où la société est implantée.
Répétées et manquant de discrétion, ces approches ont été repérées par les services russes, assure le plaignant.
Elles ont eu selon lui pour conséquences la perte d’un important contrat en Russie et des ennuis pour le fondateur d’Jelen Betong, Atle Berge, et son employé, Kurt Stje, arrêtés et interrogés à Mourmansk puis déclarés indésirables dans le pays pendant dix ans.
Jelen Betong réclame environ 140 millions de couronnes (près de 14 millions d’euros) de dédommagements à l’État.
«Cette affaire est complètement unique dans l’histoire judiciaire norvégienne», a déclaré l’avocat de la société, Per Ristvedt, avant l’ouverture du procès au tribunal d’Oslo.
«Peut-être faut-il se poser la question de savoir s’il est naturel de prendre contact avec des hommes d’affaires actifs à Mourmansk, des civils, des personnes qui sont des amateurs et ne sont pas prédisposées à devenir des informateurs», a-t-il fait valoir auprès de la chaîne TV2.
S’il y a bien eu des contacts de la part des services de renseignement, il s’agissait de discussions habituelles sur la sécurité, affirme le procureur général Fredrik Sejersted, qui représente l’Etat.
«C’est un aspect légitime de l’activité du PST», a-t-il dit à TV2.
Le procès de cinq jours, en partie à huis clos, se distingue aussi par l’identité de certains témoins appelés à la barre.
La liste inclut l’ancien ministre des Affaires étrangères et actuel dirigeant de l’opposition travailliste, Jonas Gahr Støre, et Frode Berg, libéré l’an dernier par Moscou dans le cadre d’un échange d’espions. M. Berg avait été condamné à 14 ans de prison en Russie après avoir reconnu avoir joué les courriers pour les services norvégiens, déjà accusés d’amateurisme.