Algérie : alerte aux frontières sud après une attaque kamikaze

Un attentat kamikaze a ciblé, dimanche 9 février, un poste avancé de l’armée algérienne dans la zone frontalière avec le Mali, près de la région de Timiaouine, à l’extrême sud du pays.

Selon l’armée, « un détachement de l’Armée nationale populaire a été la cible, ce jour 9 février 2020 à 10 h 50, dans la zone frontalière de Timiaouine, à Bordj Badji Mokhtar, en 6e région Militaire, d’un kamikaze à bord d’un véhicule tout-terrain piégé ». « Aussitôt identifié, le militaire chargé du contrôle de l’accès est parvenu à mettre en échec la tentative d’entrée en force du véhicule suspect. Cependant, le kamikaze a fait exploser son véhicule, causant le décès du militaire en faction. »

Le jeune soldat en faction, Benadda Brahim, la vingtaine, issu de Relizane, dans l’ouest du pays, a été tué dans l’attaque. Le président Abdelmadjid Tebboune a exprimé ses condoléances à ses proches sur les réseaux sociaux. Le soldat, salué comme un « martyr » sur les réseaux sociaux, « a criblé de balles le véhicule qui fonçait sur la caserne pour l’arrêter avant que le kamikaze ne se fasse exploser avec son 4×4 », expliquent nos sources. Le patron de l’armée, le général major Saïd Chengriha, a également présenté ses condoléances aux proches du soldat, saluant « les éléments du détachement qui ont pu déjouer et mettre en échec cette tentative désespérée en quête d’impact médiatique ».

« L’assaillant voulait profiter de l’effet de surprise en opérant en milieu de matinée (10 h 50) : la plupart des attentats dans la région sahélienne se produisent ou à la tombée du jour ou très tôt le matin, à l’aube, pour profiter de l’obscurité », affirme une source. Vingt minutes après l’attaque kamikaze, des hélicoptères de combat des forces aériennes algériennes ont ratissé les environs et la bande frontalière algéro-malienne, alors que le niveau d’alerte des forces de combat a été élevé avec augmentation des rotations des avions de surveillance de toutes les frontières avec le Mali, le Niger et la Libye.

« Des règles d’engagement très strictes ont été communiquées aux unités de combat dans toutes les régions frontalières », assurent nos sources, qui craignent le remake de l’attaque de Tiguentourine, en janvier 2013, quand des terroristes d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) ont pris en otage les employés d’un site gazier. Les assaillants étaient venus du nord du Mali, passés en Libye, puis ont frappé dans cette zone du Sud-Ouest algérien. « Des attaques provenant au-delà de nos frontières sont toujours une menace », explique notre source à Alger.

Si aucune revendication n’a été rendue publique jusqu’à maintenant, tous les regards se portent sur le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM) de Iyad Ag Ghali, proche d’Al-Qaïda. « Cet attentat prouve que les groupes armés terroristes restent bien implantés dans le Nord-Mali, particulièrement dans l’Adrar des Ifoghas (massif montagneux) », détaille un expert.

Il rappelle que « le GSIM a mené plusieurs attaques similaires au Mali et au Niger ». Au Mali, le 24 février, un véhicule piégé explose avec ses deux occupants à l’entrée du camp militaire de Koulikoro (deux militaires et civil maliens blessés), une attaque revendiquée par le GSIM ; le 22 juillet, deux soldats français et cinq soldats estoniens sont blessés par l’explosion d’un véhicule à l’entrée d’une base française à Gao. Le GSIM a également revendiqué l’attaque du camp de l’armée nigérienne à Inates avec deux véhicules kamikazes en juillet 2019.

Selon nos sources, le poste avancé ciblé dans la région de Timiaouine fait partie d’un réseau de défense et de surveillance maillant les très longues frontières terrestres du pays (6 511 km en tout). La guerre en Libye et l’instabilité sécuritaire au nord du Mali ont poussé le commandement militaire algérien à opter pour une stratégie de projection de force massive, installant des casernes et des secteurs opérationnels dans plusieurs localités dans les confins de l’immense Sahara. Plusieurs dizaines de milliers de militaires, de gendarmes et de gardes-frontières surveillent la frontière avec la Libye, le Mali et le Niger, appuyés par des unités blindées, l’aviation de reconnaissance et de combat et la surveillance électronique. Selon le bilan officiel de l’armée, 15 terroristes ont été éliminés à travers le territoire alors que 25 autres ont été arrêtés et 44 se sont rendus. Ces derniers sont majoritairement des éléments algériens activant dans les groupes armés du nord du Mali et qui se retrouvent coincés par les opérations françaises au Mali et l’étau de l’ANP à la frontière algérienne.

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