Les fêtes religieuses « sources de risques pour le confinement », selon Matignon

Alors que les fêtes majeures des trois religions monothéistes vont se succéder en avril et mai, les autorités françaises s’inquiètent des regroupements festifs qu’elles pourraient provoquer.

Les mois d’avril et mai voient se succéder cette année les fêtes majeures des trois grandes religions monothéistes (Pessah, Pâques et le ramadan), et cela n’est pas sans inquiéter les autorités françaises. Elles redoutent que les rituels, habituellement célébrés en famille, ne poussent les fidèles à sortir de chez eux, au mépris du confinement en vigueur. Selon une note confidentielle du Premier ministre, que France 24 a pu consulter, Matignon appelle les préfectures à la plus grande vigilance pendant ces périodes considérées comme « sources de risques pour le confinement ».

Les célébrations de Pessah ont commencé mercredi 8 avril au soir. Les catholiques, pour leur part, s’apprêtent à célébrer la semaine sainte rythmée par le « Triduum pascal » – Jeudi saint, ce 9 avril, suivi du Vendredi saint et du dimanche de Pâques. Enfin, les musulmans débuteront le ramadan le 23 avril au soir.

Ces trois fêtes majeures des religions monothéistes sont habituellement l’occasion de réunions familiales et festives. Mais en temps de coronavirus, ces regroupements sont interdits et Matignon n’entend pas donner de dérogations. « Les mesures de confinement doivent être rigoureusement respectées », insiste la note en introduction.

« Le fidèle doit prier isolément »

Tout n’est pas interdit, rappelle Matignon. Les fidèles sont autorisés à se rendre dans les lieux de culte qui restent ouverts, mais « individuellement » et « muni d’une attestation de déplacement dérogatoire ». Comme pour les autres déplacements, cette sortie doit être effectuée dans « la limite d’une heure quotidienne et dans un rayon d’un kilomètre du domicile ».

Dans les lieux de culte, les fidèles doivent prier « isolément » et rester « dispersés », précise la note. À charge de chaque communauté de respecter ces consignes.

Pour ceux qui n’auraient pas de lieu de culte à proximité du domicile ou ne souhaiteraient pas sortir de chez eux, les cérémonies peuvent être célébrées à huis clos par les ministres du culte et enregistrées en vidéo afin d’être diffusées à la communauté de culte. Le cadre de ces enregistrements devra lui aussi respecter les règles du confinement et les mesures de distanciation sociale.

« Ces prescriptions, de portée nationale, peuvent faire l’objet d’adaptations locales plus restrictives par les préfets », souligne la note, laissant donc la liberté aux préfectures de fermer des lieux de culte si elles le jugent nécessaire.

Les cultes à distance

Les préfets sont priés d’inviter les autorités religieuses de leur circonscription à diffuser des messages pour « rappeler les prescriptions réglementaires en insistant sur le respect du confinement » et à « favoriser une pratique du culte fondée sur l’usage des réseaux sociaux (…), de la télévision ou d’Internet ».

Plusieurs ministres des cultes ont déjà appelé à respecter le confinement. Le grand rabbin de France, Haïm Korsia, a diffusé plusieurs appels demandant à la communauté juive de respecter le confinement les 8 et 9 avril, pour les deux soirs du seder, repas qui commémore la fuite d’Égypte et l’exode biblique du peuple juif.

Du côté de l’Église catholique, depuis le début du confinement, près d’une paroisse sur deux retransmet déjà ses célébrations dominicales. La cellule interministérielle de crise de Matignon semble cependant inquiète à propos des célébrations de Pâques. « Les déplacements visant à se retrouver en famille et ceux qui consisteraient à se rassembler dans les églises constitueront les points d’attention majeurs », peut-on lire dans la note.

« Périodes et zones sensibles »

Quant aux célébrations du ramadan, les autorités estiment que plusieurs points nécessitent une vigilance particulière. Les préfectures devront s’assurer que les lieux de culte resteront fermés, si les consignes de confinement n’ont pas évolué d’ici le 23 avril. Elles devront également faire en sorte que les règles de distanciation sociale soit respectées lors des courses alimentaires, « qui provoquent habituellement des rassemblements dans les commerces communautaires », précise la note.

Enfin, il est demandé aux préfets une surveillance attentive au moment de l’iftar, la rupture du jeûne tous les soirs du ramadan, de Laylat al-Qadr, la Nuit du destin, le 19 mai, et de l’Aïd el-Fitr, qui marque la fin du ramadan.

Les préfectures doivent préparer cette période « en lien avec l’ensemble de la communauté religieuse ».

Le non-respect des règles pourra être puni et les préfets doivent prévoir les ressources de sécurité nécessaires pour les faire appliquer. Ils doivent ainsi « focaliser l’effort des FSI (forces de sûreté intérieure, NDLR) sur les périodes et zones sensibles (soirées, etc.) pour réprimer tout rassemblement sur la voie publique ».

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