Le géant de l’industrie aérienne a confirmé mercredi réduire ses effectifs mondiaux d’environ 10% et diminuer la production de ses avions long-courriers pour faire des économies, en raison de la pandémie de coronavirus qui décime le transport aérien et les commandes d’avions.
Ces suppressions d’emplois, qui ont déjà commencé, se feront via un programme de départs volontaires et des licenciements secs. Elles concernent principalement la division aviation civile, dont les effectifs vont être réduits de 15%, a précisé le directeur général David Calhoun, dans un courrier interne aux salariés en marge de la publication des résultats du premier trimestre.
Mi-avril, des sources proches du dossier avaient indiqué à l’AFP que cette cure d’austérité pourrait affecter au moins 7 000 employés, Boeing employant 70.000 personnes dans l’Etat de Washington, au nord-ouest des Etats-Unis, où se trouvent la plupart de ses usines d’avions civils. Il dispose d’un site d’assemblage du 787 en Caroline du Sud.
Boeing, qui produit également des équipements militaires et spatiaux et emploie quelque 160.000 personnes à travers le monde, n’a pas donné de chiffre précis.
« La nette réduction de la demande pour nos produits et services pour les prochaines années ne peut simplement pas soutenir les niveaux élevés de notre production » actuelle, justifie David Calhoun, dans le courrier consulté par l’AFP.
Il a ajouté que l’avionneur faisait face à « des défis complètement inattendus ».
Boeing était déjà en crise avant le Covid-19: l’immobilisation au sol le 13 mars 2019 du 737 MAX, son avion vedette, après deux accidents rapprochés ayant fait 346 morts, avait déjà fortement réduit ses revenus, gonflé sa dette et causé sa première perte annuelle en deux décennies.
Le constructeur aéronautique fait l’objet d’une enquête au pénal du ministère américain de la Justice et d’une flopée de plaintes de familles de victimes.
Les mesures de restriction des voyages, de distanciation sociale et de confinement pour endiguer la propagation du Covid-19 ont aggravé la situation.
Elles ont en effet réduit le trafic aérien de plus de 95% aux Etats-Unis, d’après M. Calhoun, tandis que les revenus des compagnies aériennes dans le monde devraient chuter de 314 milliards de dollars cette année.
Boeing a dû fermer temporairement ses usines américaines et vient de les rouvrir mais la reprise de l’activité sera progressive.
Outre les suppressions d’emplois, l’avionneur va également, comme son rival Airbus, réduire les cadences de production de ses long-courriers pour s’adapter au nouveau paysage aérien.
Il ne produira plus que dix appareils 787 par mois jusqu’en 2021, contre 14 en début d’année, et descendra à sept unités en 2022.
La production du 777 et de son remplaçant 777X va elle passer de cinq avions par mois à trois en 2021.
Celle du 737 MAX, suspendue depuis janvier, reprendra à de « faibles taux » au moment de la remise en service en 2020 et s’établira à 31 appareils par mois en 2021. Avant son immobilisation, Boeing en produisait 52 unités par mois.
Boeing insiste sur le retour dans le ciel du MAX mi-2020, mais la pandémie devrait le repousser au moins à la fin de l’été, ont indiqué à l’AFP des sources industrielles. Les livraisons devraient reprendre elles au troisième trimestre, a affirmé mercredi David Calhoun.
Les déboires du MAX et la crise sanitaire ont plongé Boeing dans le rouge au premier trimestre, avec une perte nette de 641 millions de dollars.
Le chiffre d’affaires a baissé de 26,2 % sur un an à 16,91 milliards de dollars, plombé par une chute d’environ un tiers des livraisons d’avions civils.
La dette a bondi, de 27,3 milliards de dollars au 31 décembre à 38,9 milliards fin mars.
« Boeing est persuadé de pouvoir obtenir des liquidités suffisantes pour financer ses opérations », affirme le fabricant d’Air Force One, l’avion présidentiel américain.
Boeing a demandé une aide gouvernementale d’au moins 60 milliards de dollars pour lui et ses 17.000 sous-traitants, mais ne dit pas s’il entend parallèlement solliciter les 17 milliards de dollars promis aux entreprises œuvrant à la sécurité nationale dans le plan d’aide fédéral.
Si les discussions avec le Trésor doivent démarrer prochainement, d’après des sources proches du dossier, M. Calhoun a déjà averti qu’une entrée de l’Etat fédéral au capital était une ligne rouge à ne pas franchir.