C’est une histoire de pieds nickelés ou de médiocre roman policier. En 2011, trois jeunes Russes se font virer 120 millions de dollars sur un compte de la banque Bordier à Genève.
C’est un petit établissement privé, discret, ayant pour slogan « Une banque de relations ». L’argent venait d’une banque lettone, à l’occasion d’un transfert entre une société aux Bahamas et une autre domiciliée au Panama.
On peut embrasser la profession de banquier sans être obligatoirement curieux. Bordier ne s’étonne pas non plus quand les trois hommes demandent à retirer 109 millions de dollars en liquide. Une telle somme ne rentre pas dans une valise, même en billets de 100 dollars.
La manœuvre ne relève d’aucune logique économique si ce n’est qu’il s’agit d’une opération grossière pour blanchir de l’argent. Toutefois, la justice genevoise n’a pas souhaité inquiéter la banque Bordier & Cie, active à Paris, Londres, Montevideo, Singapour, et dans les îles Turques-et-Caïques, dans la Caraïbe.
Depuis 2011, cette affaire n’a plus guère occupé la une de la presse locale. En 2014, on apprenait simplement que l’un des Russes, Ruslan Pinaev, avait préféré s’établir en Israël. Ayant obtenu un sauf-conduit de la part de la Suisse, il avait pu rencontrer à deux reprises les magistrats genevois en janvier et septembre 2013, sans être inquiété. Malgré tout, la justice de la cité de Calvin n’avait pas lâché le morceau.
Le site d’investigations Gotham City vient de révéler qu’après neuf années de procédure, ayant usé trois procureurs, le ministère public a finalement condamné Ruslan Pinaev, coupable d’avoir blanchi personnellement 35 millions de dollars, à… 5 mois de prison avec sursis et 3 000 francs suisses d’amende (2 850 euros).
En revanche, un autre cerveau de la magouille, Georgy Urumov, qui avait fait l’erreur de se domicilier à Londres, a été condamné à 12 ans de prison ferme en 2017. Ce qui fait dire à Gotham City : « Si l’idée vous prend d’orchestrr une vaste fraude portant sur des dizaines de millions de dollars, sachez qu’en cas de pépin, mieux vaut vous faire prendre à Genève qu’à Londres. »