Emmanuel Macron de retour au Liban pour accentuer la pression sur ses dirigeants

Le président français se rend au Liban lundi soir pour une visite de 24 heures. Une visite durant laquelle il pressera les dirigeants libanais de mettre sur pied un gouvernement d’union pour réaliser des réformes structurelles jugées nécessaires par Paris.

Près d’un mois après l’explosion qui a dévasté Beyrouth, Emmanuel Macron se rend de nouveau au Liban, mardi, le premier septembre, pour accentuer un peu plus la pression envers les dirigeants libanais, qu’il exhorte à mettre sur pied un gouvernement d’union ainsi qu’un programme de réformes.

« Emmanuel Macron fera tout ce qu’il faut et mettra la pression pour que le programme de réformes au Liban soit mis en œuvre », a déclaré, vendredi 28 août, une source élyséenne à Reuters.

Lors de sa première visite, le 6 août, le président français avait condamné, en répondant à des Libanais lors d’une déambulation dans les rues, la corruption des dirigeants du pays du Cèdre. « Je comprends votre colère. Je ne suis pas là pour cautionner le régime. Je suis là pour vous aider en tant que peuple. Je vous garantis que cette aide n’ira pas dans les mains de la corruption », avait-il lâché.

Depuis, face à la colère de la rue, qui prend la classe politique pour responsable de l’explosion, le gouvernement de Hassan Diab a démissionné le 10 août. Mais il a fallu attendre trois semaines pour que les consultations parlementaires, devant aboutir à la désignation d’un nouveau Premier ministre, finissent par être organisées lundi 31 août.

La visite du président français à Beyrouth a été précédée de plusieurs messages envoyés par Paris. Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a ainsi mis en garde les dirigeants libanais, jeudi 27 août, sur RTL. « Le risque aujourd’hui, c’est la disparition du Liban. Donc, il faut que ces mesures soient prises », a-t-il alors martelé.

« Ce pays est au bord du gouffre. Il y a la moitié de la population qui vit au-dessous du seuil de pauvreté, il y a une jeunesse désemparée, il y a une situation du chômage qui est épouvantable, une inflation qui est ahurissante », a-t-il énuméré.

La France a coorganisé avec l’ONU une conférence internationale en visioconférence, le 9 août. Les participants se sont engagés pour une aide de 250 millions d’euros, dont 30 millions de la part de Paris.

Mais l’Hexagone n’entend pas « signer de chèque en blanc » au Liban, comme l’a déclaré Emmanuel Macron le 6 août à Beyrouth et comme l’a redit jeudi Jean-Yves Le Drian. L’ambassadeur français au Liban a donc fait parvenir au président libanais, Michel Aoun, et au président de la Chambre des députés, Nabih Berri, un document listant des mesures à prendre pour l’avenir du pays.

Ce texte de deux pages évoque notamment un audit de la banque centrale, la nomination d’un gouvernement provisoire en mesure de mettre en œuvre en urgence des réformes et des élections législatives anticipées dans un délai d’un an.

Ce document « reprend l’essentiel des propositions qui étaient déjà faites dans le cadre de la conférence Cèdre et du Groupe international de soutien au Liban du 11 décembre 2019 », a commenté auprès de Reuters une source à la présidence de la République française. « Ce document renouvelle la disponibilité de la France à soutenir le Liban dans ce cadre. Ce n’est nullement une feuille de route, c’est informel. »

Alors que l’État libanais est en défaut sur sa dette et que la livre chute depuis des mois, le gouvernement libanais n’est pas parvenu à conclure un accord avec le Fonds monétaire international (FMI) malgré des mois de discussions, en raison notamment de désaccords sur les réformes et sur l’ampleur des pertes à faire assumer au secteur bancaire.

« La priorité doit aller à la formation rapide d’un gouvernement pour éviter un vide du pouvoir qui laisserait le Liban s’enfoncer davantage dans la crise », peut-on lire dans le document.

Il cite quatre domaines nécessitant des mesures d’urgence : l’aide humanitaire et la réponse à la pandémie de Covid-19 ; la reconstruction après la catastrophe du 4 août ; les réformes politiques et économiques et enfin des élections législatives anticipées.

Mais la situation politique libanaise est des plus complexes. Jusqu’à présent, aucun consensus n’a émergé sur le nom du futur Premier ministre, en raison de profondes divergences entre les forces politiques traditionnelles.

Les blocs parlementaires et les députés indépendants doivent se succéder au palais présidentiel dès lundi matin pour annoncer tour à tour leur préférence. Mais le choix du puissant Hezbollah pro-iranien et de ses alliés, qui contrôlent la majorité du Parlement, sera déterminant. Le Hezbollah a ainsi déjà fait savoir qu’il était opposé à un gouvernement « neutre » et qu’il privilégiait un cabinet rassemblant toutes les forces politiques.

Le président du Parlement, et chef du mouvement chiite Amal, Nabih Berry, allié du Hezbollah, a pour sa part proposé le retour de Saad Hariri, qui avait démissionné en octobre 2019 sous la pression de la rue.

L’ancien Premier ministre a cependant annoncé le 25 août qu’il n’accepterait pas de revenir, dénonçant « certaines forces politiques qui sont toujours dans un état de déni sévère de la réalité du Liban », dans une allusion au parti présidentiel, le Courant patriotique libre, et ses deux alliés chiites, Amal et le Hezbollah, qui avaient constitué le gouvernement démissionnaire de Hassan Diab.

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