Brésil : polémique autour d’un recrutement réservé aux Noirs

Le géant brésilien de la distribution Magazine Luiza a suscité d’intenses débats en annonçant la création d’un programme de recrutement de futurs cadres réservé aux personnes noires, une initiative critiquée par des alliés du président d’extrême droite Jair Bolsonaro.

 

« Nous savons que nous risquons d’être attaqués en justice, mais nous allons nous battre, nous n’allons pas céder », a déclaré Luiza Helena Trajano, PDG de Magazine Luiza, dans un entretien publié mardi dans le quotidien Folha de S. Paulo. Elle faisait allusion notamment à un tweet du député Carlo Jordy, du Parti social libéral (PSL), ancien parti de Bolsonaro, qui a annoncé avoir déposé « une requête devant le parquet pour l’ouverture d’une enquête pour racisme en raison d’un programme de recrutement uniquement pour les Noirs ».

Le programme créé par Magazine Luiza a pour objectif le recrutement de jeunes employés qui suivent une formation spéciale pour devenir cadres à l’avenir et touchent d’entrée 6 600 réais (environ 1 000 euros), plus de six fois le salaire minimum brésilien.

« Seuls 10 des 2 000 personnes en formation que nous avons recrutées jusqu’aujourd’hui étaient des personnes noires. Nous avons tenté de changer ça avec des processus de recrutements traditionnels, mais nous n’y sommes pas parvenus », a rappelé Luiza Helena Trajano. Au sein de cette entreprise, qui possède plus de 1 000 points de vente physique et rivalise avec Amazon pour la distribution en ligne au Brésil, 53 % des employés sont noirs ou métis, mais seuls 16% d’entre eux occupent des postes d’encadrement. Mais pour Sergio Camargo, personnalité noire controversée placée par le président Bolsonaro à la tête de la Fondation Palmares, organe public censé promouvoir l’égalité raciale, ce programme de recrutement consiste à « combattre le racisme avec plus de racisme ».

Au Brésil, dernier pays d’Amérique à avoir aboli l’esclavage, en 1888, plus de la moitié des 212 millions d’habitants sont noirs ou métis. Mais cette population noire, bien que majoritaire, n’occupe que 5 % des postes de cadre des 500 plus grandes entreprises brésiliennes.