Pour la première fois dans l’histoire moderne de la Turquie, une pièce de théâtre en langue kurde était programmée par un théâtre municipal à Istanbul.
Mais les autorités turques ont empêché le projet de se réaliser le jour même de sa première représentation, mardi 13 octobre, ont rapporté les organisateurs de l’événement.
La pièce de théâtre Beru est une traduction en langue kurde de la pièce Klaxon et Trompettes… et Pétarades du célèbre écrivain italien Dario Fo. Elle figurait dans le programme d’octobre du théâtre municipal d’Istanbul, qui possède une dizaine de salles à travers la ville.
Créé en 1914, le théâtre municipal avait envisagé d’accueillir mardi soir la pièce mise en scène par la troupe indépendante Teatra Jiyana Nu (Théâtre de vie nouvelle) pour la première fois dans sa salle située dans le quartier de Gaziosmanpasa. « Nous étions sur scène, tout prêts et en train d’attendre les spectateurs lorsque la décision d’interdiction de la sous-préfecture nous a été délivrée », a raconté l’actrice Ruges Kirici à l’AFP.
Longtemps interdite, l’utilisation de la langue kurde dans l’espace public avait pourtant été autorisée partiellement depuis les années 1990 et plus largement depuis le début des années 2000. Le président turc Recep Tayyip Erdogan, lorsqu’il était encore Premier ministre entre 2002 et 2014, avait élargi le champs d’application de ces libertés. Il avait également tenté, avant d’abandonner en 2015, un processus de paix avec le PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan) qui mène depuis plus de trente ans une guérilla contre le pouvoir turc.
« Nous n’attendions pas une telle interdiction. Il y a eu des cas similaires dans les années 1990, mais nous pensions que tout cela était dépassé », s’est lamenté l’acteur Omer Sahin. « C’est une honte pour ce pays (..) Pourquoi jouer cette pièce en kurde serait une menace pour l’ordre public ? On allait rire ensemble à une comédie, même cela n’a pas été toléré », a affirmé de son côté Ruges Kirici.