Ils sont soupçonnés d’avoir été des chevilles ouvrières du « jihad médiatique »: deux hommes comparaissent depuis ce mardi à Paris pour avoir participé à la propagande du groupe Etat islamique en France en 2016 et 2017.
Les deux prévenus, en détention provisoire depuis leur interpellation fin 2017 à Roubaix et mi-2018 à Dijon, sont jugés jusqu’à vendredi pour « association de malfaiteurs terroriste ». Le premier, âgé de 34 ans, est soupçonné d’avoir traduit de l’arabe au français puis diffusé sur l’application cryptée Telegram les communiqués, bulletins radiophoniques et vidéos du centre médiatique « An-Nûr », organe d’information de Daech.
Selon l’accusation, après la perte de Raqa par le groupe terroriste en octobre 2017, il a pris un rôle d’organisateur sous le nom d' »Abou Bara », recrutant et gérant une équipe francophone d’une quinzaine de « mounassirs » (traducteurs et diffuseurs), ce qu’il conteste.
Les investigations ont aussi montré des liens avec un certain « Hamza » alors en zone irako-syrienne, identifié comme étant Adrien Guihal, un vétéran du jihad français parti en Syrie, connu pour œuvrer au sein des organismes médiatiques de l’organisation – il a notamment prêté sa voix à la revendication audio de l’attentat de Nice en 2016.
« Je lui ai jamais parlé directement, ça a toujours été à travers d’autres personnes« , s’est défendu le prévenu, lunettes sur le masque, qui était à l’époque en recherche d’emploi.
Il avait dit pendant l’instruction avoir des regrets: aujourd’hui, « j’ai dépassé les regrets, je suis plus dans la honte », a-t-il affirmé, reconnaissant son rôle dans la propagande mais réfutant avoir été à la tête d’une quelconque hiérarchie.
Parmi ses subordonnés, selon l’accusation : le deuxième prévenu, 35 ans, chauffeur-livreur avant son arrestation, qui comparaît pour avoir participé à la mise en forme – orthographe et syntaxe notamment – de cette propagande puis de l’avoir diffusée sur Telegram.
L’enquête avait démarré après l’interpellation en juillet 2017 en Algérie d’une jeune franco-algérienne qui avait rapporté s’être radicalisée sous l’influence d’un homme installé à Roubaix. La police avait fait le rapprochement avec le premier prévenu, qui avait été interpellé en Egypte plus tôt et expulsé vers la France.
La procédure algérienne n’a cependant pas été versée au dossier et la jeune femme n’a pas été interrogée par la justice française.
Un troisième homme devait comparaître à ce procès, mais son avocat ayant été testé positif au Covid-19, il est lui-même cas-contact. Le tribunal a décidé de disjoindre son dossier et de le juger séparément le 2 mars 2021.