Naval Group est à nouveau la cible de virulentes critiques en Australie. Une situation fréquente depuis que le groupe français a remporté en 2016 le «contrat du siècle» de 12 sous-marins d’attaque. Une campagne de dénigrement aux forts accents géopolitiques, sur laquelle revient Olivier de Maison Rouge, avocat spécialisé en intelligence économique.
Naval Group sous le feu des critiques en Australie. Selon l’Australian Financial Review, Scott Morrison, le Premier ministre australien, serait «de plus en plus exaspéré» par les «difficultés» que rencontrerait le programme de sous-marins de classe Attack. Ce «contrat du siècle» de 50 milliards de dollars australiens (31,2 milliards d’euros) avait été remporté par le constructeur naval français en 2016 et concrétisé début 2019 afin de livrer et d’entretenir à partir de 2030 douze sous-marins d’attaque à la Royal Australian Navy.
Le surcoût que représenterait la phase de design par rapport à ce qu’avait budgétisé Canberra, ainsi que la charge de travail assurée en Australie auraient formés une «accumulation de frustrations» côté australien, ont relayé Les Échos. Le quotidien économique évoque une «réelle» menace d’annulation du contrat. De son côté, le constructeur naval français réfute point par point chacune des accusations qui lui sont portées et son nouveau PDG a prévu de se rendre en Australie. Dans les faits, le contrat qui –pour l’heure– lie les deux parties ne concerne que le design des sous-marins, comme l’explique en détail La Tribune, la prochaine signature –portant sur la fabrication en elle-même des douze sous-marins– doit normalement survenir en 2023. «C’était une volonté des Australiens», rappelle BFMTV à propos de ce «saucissonnage».
«Une opération de guerre informationnelle»
Pour autant, ces griefs de l’Australie sont-ils réellement sincères? Si aujourd’hui, la presse française met en avant les 60% du contrat devant être assurés par des sociétés australiennes, elle semble oublier un peu vite ce que doit ce chiffre à… la pression médiatique. Hervé Guillou, ex-PDG de Naval Group, dénonçait en février 2020 une «campagne malveillante» à l’œuvre en Australie. Celle-ci aurait «contraint» Naval Group –selon l’école de guerre économique (EGE) à accorder une hausse de 50 à 60% de la sous-traitance accordée par les Français à des partenaires locaux.
«Cette affaire est instrumentalisée», réagit auprès de Sputnik l’avocat Olivier de Maison Rouge, spécialisé en intelligence économique. «C’est une opération de guerre informationnelle […] de toute évidence, c’est l’industrie technologique de l’armement qui est visée, à travers des actions de guerre informationnelle de déstabilisation», poursuit-il.
Du côté des grands médias, on avance aujourd’hui l’«envie», la «jalousie» que provoquerait un tel contrat de plus de 31 milliards d’euros auprès des concurrents industriels de Naval Group afin d’expliquer cette vendetta politico-médiatique lancée à son encontre.
«Laissez-moi vous dire que je ne crois pas en la libre concurrence en matière d’armement. C’est toujours faussé, il y a toujours des manœuvres et des déstabilisations», tranche l’avocat. «En matière d’armement, il n’y a pas d’entreprise totalement privée, c’est toujours piloté par les États», ajoute-t-il.
Ce dernier rappelle notamment l’affaire de la fuite géante qui avait touché Naval Group (alors DCNS) concernant ses sous-marins Scorpène, fleuron du groupe à l’export, destiné notamment à l’Inde, au Brésil, à la Malaisie et au Chili. En aout 2016, quelques semaines à peine après que le groupe public français ait remporté le fameux «contrat du siècle», The Australian révélait en détail le contenu de 22.400 pages d’information du Scorpène, portant un coup terrible à la crédibilité de l’industriel vis-à-vis de tous ses clients. Le gouvernement australien ne manqua pas de se saisir de l’affaire.
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