Rencontre-surprise entre Hariri et Macron: pour sortir le Liban du chaos, ils misent l’un sur l’autre et jouent gros

En visite surprise à Paris, Saad Hariri, le Premier ministre libanais, a rencontré Emmanuel Macron pour échanger sur l’initiative française pour la formation d’un gouvernement d’urgence au Liban. En échec au Levant, l’Élysée modifie son approche. Une nouvelle posture qui s’aligne sur la logique américaine, estime Michel Fayad, économiste libanais.

Les liens privilégiés entre Paris et Beyrouth prennent parfois un tour inattendu: le 10 février, sans prévenir, le Premier ministre libanais Saad Hariri est venu à Paris pour s’entretenir avec Emmanuel Macron. Cette rencontre, très peu médiatisée, fait l’objet de nombreuses spéculations au pays du Cèdre. Pourquoi Saad Hariri s’est-il rendu à Paris, alors que Macron doit prochainement se rendre au Liban?

«Hariri est venu en catimini à Paris pour ne pas gêner le protocole. Il est juste le Président du conseil désigné, et non en exercice» explique à Sputnik Michel Fayad, économiste libanais. «Cette visite imprévue doit préparer la future visite de Macron au Liban.»

Une visite bien discrète, mais dont l’enjeu est donc de taille. Il s’agit de la troisième depuis l’explosion tragique du port de Beyrouth, le 4 août dernier. En effet, Emmanuel Macron a fait du Liban un dossier prioritaire aussi bien pour la France qu’à titre personnel. Cet investissement n’est pas anodin.

Le Liban et Saad Hariri: une affaire personnelle pour Macron

Le Chef de l’État veut également s’assurer d’un maintien de l’influence française en Orient. Sans le Liban, Paris n’a plus de porte d’entrée dans la région. S’étant rendu à deux reprises à Beyrouth après l’explosion du port le 4 août 2020, Macron avait tenté de contraindre les Libanais à la formation d’un gouvernement, allant jusqu’à imposer un ultimatum à la classe politique du pays, afin d’assurer les réformes économiques souhaitées et voulues par tous les partis. Ainsi Saad Hariri, «ami du Président français», serait-il venu s’assurer que Paris ira encore dans son sens pour la formation d’un gouvernement, analyse Michel Fayad.

Jusque-là, le Président de la République semble avoir minoré la complexité du Liban: «il ne peut pas se baser uniquement sur une communauté», explique le consultant économique et financier. Ainsi, lui a-t-on reproché ses liens avec Saad Hariri et la communauté sunnite libanaise. Et si le dirigeant français est apprécié par la communauté chrétienne, souvent francophile, celui-ci s’est dans les faits aligné sur les exigences sunnites… donc «sur celles du Golfe», explique l’économiste libanais.

Les liens entre la famille Hariri (père et fils) et la France sont anciens. Rafik Hariri et Jacques Chirac entretenaient une relation amicale. L’ancien Président de la République avait logé pendant quelque temps dans les appartements de la famille Hariri à Paris. À la mort de Rafik Hariri en 2005, Chirac était présent à ses obsèques et avait accusé le pouvoir syrien d’avoir fomenté l’attentat. La pression internationale et française a mis fin à la tutelle syrienne au Liban en 2005.

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