Le touriste Benjamin Brière, détenu en Iran depuis 10 mois, a été accusé d’«espionnage et de propagande contre le système». Sa sœur a accordé un entretien au Point dans lequel elle appelle les autorités à agir. Il n’est toutefois pas le premier Français à avoir été arrêté dans ce pays au cours de ces dernières années.
Dans une interview exclusive accordée au Point, la sœur de Benjamin Brière, arrêté en Iran, tient à souligner qu’il n’est qu’un touriste «parti vivre son rêve de van».
«Coup de massue», incompréhension «la plus totale»
Le 15 mars, l’un des avocats de cet homme âgé de 35 ans, détenu en Iran depuis 10 mois, a annoncé sur Twitter qu’il venait d’être accusé d’«espionnage et de propagande contre le système». Il encourt une peine d’emprisonnement de longue durée.
Sa sœur affirme ne pas avoir eu «de nouvelles directes de Benjamin récemment».
«Les dernières informations sont les deux accusations tombées hier, à savoir les charges d’espionnage et de propagande. C’est un coup de massue, un choc de se dire qu’elles sont bien réelles. La situation est complètement surréaliste et nous sommes dans l’incompréhension la plus totale. Les charges retenues contre Benjamin sont complètement infondées. Mon frère, en tant que touriste, est simplement parti vivre son rêve de van en Iran. C’est là que je me suis dit qu’il fallait peut-être prendre la parole pour faire avancer les choses.»
«Nous n’avançons pas»
Elle a également expliqué pourquoi elle ne s’était mise à parler que maintenant: jusqu’ici, d’après elle, le ministère français des Affaires étrangères leur avait «conseillé de garder le silence et d’attendre que les choses s’arrangent».
«Nous avions vraiment espoir que la situation se dénoue rapidement pour Benjamin. Mais cela fait maintenant près de dix mois, nous n’avançons pas et nous avons décidé de prendre la parole, car les accusations retenues contre lui sont grotesques.»
Utilisation d’un drone:
Interrogé sur le drone que Benjamin a utilisé dans une zone interdite d’Iran, elle affirme qu’il ne s’agit que d’un «simple gadget, un drone à 100 euros que vous trouvez n’importe où dans le commerce pour prendre des photos de voyage».
«Rien de plus. Moi-même, j’en utilise en vacances. Il ne s’agit en rien d’une arme de guerre ou que sais-je! Il n’y a pas à en faire toute une histoire. Dans nos pays européens, ce type de drone de pacotille reste très populaire et tout le monde en utilise. Visiblement, les choses sont différentes en Iran», souligne-t-elle.
Quant à son utilisation dans une zone interdite, la femme dit n’avoir pas eu «de preuve de cela» et que «si c’était le cas, bien évidemment, Benjamin n’en aurait pas été conscient lui-même et aurait agi par mégarde». «Ce serait de la pure maladresse. Encore une fois, mon frère n’est qu’un touriste qui se baladait en tongs en Iran!»
La France va-t-elle «tout faire pour le sortir de là»?
La sœur a tenu à rappeler que le ministère des Affaires étrangères les accompagne dans cette épreuve. «Il nous rassure et nous pouvons les appeler à n’importe quelle heure. Le consul fait son travail et nous avons des nouvelles régulières de Benjamin.»
Cependant, dix mois après son arrestation, ils ne peuvent plus «se contenter de cela». «Nous avons besoin de savoir que la France va tout faire pour le sortir de là. Nous avons besoin de le ramener chez lui après dix mois de blocage dans son dossier. Rendez-vous compte. Jusqu’à hier, il n’y avait aucune évolution sur la situation de mon frère, et surtout sur les raisons de son emprisonnement.»
Deux chefs d’accusation:
Le Français est inculpé de deux chefs d’accusation: espionnage, pour avoir pris des photos de la zone interdite, et propagande à cause d’un message publié sur les réseaux sociaux dans lequel il disait que «le hijab est obligatoire» en Iran mais pas dans d’autres pays islamiques, comme l’a indiqué son avocat.
Pas un cas isolé:
Depuis 2019, trois citoyens français, dont Benjamin Brière, ont été arrêtés en Iran, souvent accusés d’espionnage. Fariba Adelkhah, spécialiste du chiisme et de l’Iran post-révolutionnaire à Sciences Po Paris, a été arrêtée début juin 2019 et a par exemple été condamnée à cinq ans de prison pour «collusion en vue d’attenter à la sûreté nationale» et «propagande contre le système» politique iranien. Elle rejette toujours ces accusations et est actuellement assignée à résidence à Téhéran, sous contrôle d’un bracelet électronique.
Quant au chercheur français Roland Marchal, arrêté en même temps que Mme Adelkhah, il a été libéré en mars 2020 dans le cadre d’un échange avec un Iranien détenu en France.