Des responsables de Save the children, Médecins sans frontières et Jugend rettet ont fait l’objet d’une enquête de la justice italienne, qui sur la base de vidéos et d’échanges téléphoniques accuse des membres de ces ONG d’avoir aidé des passeurs.
Un rapport publié début mars par les autorités italiennes, relayé par le quotidien suisse Le Temps, accuse des responsables des ONG Save the children, Médecins sans frontières et Jugend rettet d’avoir facilité le trafic de migrants, en communiquant directement avec des trafiquants d’êtres humains pour recueillir les embarcations en Méditerranée.
Une vaste enquête du procureur italien de Trapani Maurizio Agnello – basée sur des vidéos, des messages et des écoutes téléphoniques – conclut que l’ONG Save the children avec le bateau Vos Hestia, Médecins sans frontières avec le Vos Prudence et Jugend rettet avec le Iuventa auraient collaboré avec les passeurs libyens et facilité l’immigration clandestine en Italie. 21 personnes sont accusées au total, entre les membres d’équipages et les responsables d’ONG. La moitié sont des Italiens, les autres sont allemands, espagnols, français, belges et britanniques.
La police italienne s’est notamment basée sur des messages dans un groupe WhatsApp auquel participaient 69 personnes, échangeant parfois des coordonnées GPS pour des rendez-vous avec les bateaux des passeurs. Dans une conversation entre deux employés de Save the children, l’un d’entre eux explique par exemple avoir vu passer «des informations sur des trafiquants» et recommande de les supprimer.
Par ailleurs, la saisie d’ordinateurs et de téléphones lors de la perquisition du Vos Hestia a permis aux enquêteurs d’analyser 12 opérations de sauvetage s’étant déroulées entre mars et octobre 2017. Dans une vidéo du 26 juin 2017, trois hommes en hors-bord, membres de la milice libyenne Dabbashi spécialisée dans le trafic de migrants, précise Le Temps, viennent avertir des représentants de Save the Children à bord du Vos Hestia de l’arrivée imminente d’un navire avec 500 migrants. Le bateau de l’ONG les récupèrera effectivement quelques instants plus tard. Autre exemple cité dans l’enquête : le 18 juin 2017, des passeurs ont assisté aux opérations de sauvetage conduites par le Iuventa de l’ONG Jugend rettet, avant de repartir avec les bateaux utilisés pour transporter les migrants.
Médecins sans frontières, dont un membre est accusé d’avoir refusé de donner l’emplacement d’une embarcation de migrants au centre de coordination italien, a réagi dans un communiqué le 3 mars. L’ONG parle d’une «criminalisation du sauvetage en mer» et d’une «attaque contre le droit d’aider». «MSF a contribué à sauver plus de 81 000 vies en mer en vertu du droit maritime et en coordination avec les garde-côtes italiens et d’autres autorités compétentes», se défendent encore les responsables humanitaires. Même explication de Save the children, qui a répondu au quotidien suisse avoir «toujours agi dans le respect de la loi et du droit international en coopération constante avec le centre de coordination de contrôle de Rome», expliquant avoir pour seul but de «sauver des vies humaines».