S’exprimant sur le rapport rendu par une équipe de l’OMS après une visite en Chine sur l’origine du virus, le patron de l’agence de l’ONU a exprimé des doutes sur cette «évaluation», appelant à «de nouvelles missions avec des experts spécialisés».
Le patron de l’OMS, accusé d’être trop complaisant envers Pékin, a durci le ton le 30 mars en se disant prêt à envoyer des experts enquêter sur l’hypothèse qu’une fuite d’un laboratoire chinois soit à l’origine de la pandémie. La Chine a toujours nié cette possibilité.
Cette thèse, selon laquelle le virus du Covid-19 s’est échappé d’un laboratoire de Wuhan, la ville chinoise où les premiers cas ont été détectés fin 2019, a été défendue avec force par l’administration américaine sous la présidence de Donald Trump, se basant sur les informations de ses services de renseignement. Des experts internationaux dépêchés en Chine par l’Organisation mondiale de la Santé en janvier pour mener l’enquête sur l’origine de la pandémie plus d’un an après son début, l’ont pratiquement exclue, jugeant «extrêmement improbable» que le virus provienne d’un laboratoire.
Sortant de son silence sur le sujet, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a créé la surprise le 30 mars en affirmant que cette hypothèse demande des enquêtes supplémentaires, «probablement avec de nouvelles missions avec des experts spécialisés que je suis prêt à déployer». Même si l’équipe a visité plusieurs laboratoires à Wuhan et envisagé l’hypothèse d’un incident de laboratoire, «je ne pense toutefois pas que cette évaluation ait été suffisamment approfondie», a-t-il dit.
Les Américains ont à plusieurs reprise souligné que cette équipe ne comportait pas de spécialiste capable d’évaluer la sécurité des laboratoires. Le docteur Ghebreyesus a également indiqué que les experts internationaux lui «avaient fait part de leurs difficultés à accéder aux données brutes» pendant leur séjour en Chine. Une rare critique publique de la façon dont Pékin a géré cette enquête conjointe. «J’espère que de nouvelles études collaboratives seront basées sur un partage de données plus large et plus rapide», a-t-il ajouté.
The team visited several labs in Wuhan, #China and considered whether the #COVID19 virus entered the human population via a lab incident. I do not believe that this assessment was extensive enough. Further data and studies are needed to reach more robust conclusions.
— Tedros Adhanom Ghebreyesus (@DrTedros) March 30, 2021
Le chef de la délégation de scientifiques internationaux, Peter Ben Embarek, a minimisé la chose en conférence de presse le 30 mars, affirmant qu’en Chine comme ailleurs certaines données ne pouvaient être partagées pour des raisons de respect de la vie privée, et qu’il s’efforçait de trouver des solutions pour avoir accès aux données «dans la phase 2 de l’étude». Il a par ailleurs reconnu qu’aucune enquête exhaustive n’avait été faite sur les laboratoires chinois, mais a fait valoir que les experts n’avaient reçu aucun «argument solide ou éléments de preuve» venant étayer l’hypothèse d’une fuite de laboratoire, qu’elle soit volontaire ou accidentelle. Dès les premiers cas fin décembre 2019, le personnel des laboratoires de Wuhan a fait des recherches sur l’origine du virus, sans toutefois trouver de trace dans leurs dossiers ou échantillons, a-t-il raconté.