Pénurie de micropuces: les USA récupèreront-ils leur place de leader sur le marché des semi-conducteurs?

La pénurie de micropuces que le monde traverse actuellement pourrait déboucher sur la diminution du nombre de véhicules fabriqués par les États-Unis. Réuni avec les géants électroniques et automobiles du pays, Joe Biden a évoqué des mesures censées aider l’industrie américaine à sécuriser sa chaîne d’approvisionnement. La solution?

Le Président américain a abordé la pénurie de micropuces avec les représentants de sociétés technologiques mondiales. Toutefois, les perspectives d’un retour des États-Unis en tant que leader dans le domaine de l’industrie des semi-conducteurs ont également été discutées. Comme l’indique un communiqué diffusé par la présidence, la rencontre a été en outre l’occasion pour la Maison-Blanche de faire part de l’empressement du pays à voir repartir les investissements dans les technologies, y compris dans la production de puces, car Washington souhaite retrouver sa position de leader.

Tenue en ligne, la rencontre en question a réuni nombre de hauts fonctionnaires américains et de hauts représentants d’entreprises telles que General Motors, Alphabet (Google), Intel. Comme annoncé par Reuters, cette réunion a été initiée par les constructeurs automobiles américains qui continuent à souffrir de la pénurie de micropuces. Ces deniers avaient prévenu sans équivoque que si la situation n’évolue pas, la production risque de chuter de 1,28 million de véhicules.

Cependant, le communiqué de la Maison-Blanche publié à l’issue de la réunion n’est pas très riche en démarches concrètes. Est-ce dû au fait que les États-Unis ont perdu leur position de leader dans le domaine des semi-conducteurs? Ainsi, si en 1990 ils étaient responsables de 37% de la production mondiale, ils ne le sont aujourd’hui qu’à hauteur de 12%, selon la Semiconductor Industry Association (SIA).

Ces derniers temps, certains géants américains du secteur ont cédé leurs positions. Ainsi, les processeurs d’Intel ne sont plus les plus rapides au monde. Par ailleurs, les dépenses pour la production des puces chez Intel sont moins importantes, à titre d’exemple, que celles du sud-coréen Samsung.

Joe Biden a donc promis 50 milliards de dollars d’aides publiques. Ces moyens doivent contribuer à la recherche, au développement et à la création de capacités de production sur le sol américain. Le Président estime que ceci permettra de créer des emplois et d’aider le pays à retrouver sa place dans le secteur, mais aussi d’éviter des déficits.

Une promotion du projet d’investissements?

Commentant la situation pour Sputnik, Chen Fengying de l’Institut chinois des relations internationales contemporaines, estime que Biden cherche juste à promouvoir son projet d’investissements de manière à ce que les Républicains aient du mal à le contester.

«Biden doit promouvoir son projet d’investissements lequel revoit l’impulsion de l’économie, des sciences et des technologies américaines, si bien qu’il met les accents appropriés. Il doit attirer l’attention publique sur son programme pour que les représentants du Parti républicain aient moins de chances de s’y opposer», avance-t-elle.

Subventionner la production ailleurs.

Elle souligne que l’objectif majeur de ce projet est de créer des emplois, ce qu’elle juge possible, vu que dans plusieurs secteurs le chômage s’est aggravé des suites de la pandémie.

«Mais les semi-conducteurs, c’est un autre problème. Il s’agit ici de hautes technologies et pas n’importe qui peut prétendre à un poste dans le domaine. Ce n’est pas facile de restituer ce domaine aux États-Unis, mais il est possible de développer une stratégie d’alliances», poursuit-elle. Et d’expliquer que les États-Unis pourraient subventionner les producteurs dans d’autres pays, notamment en Corée du Sud et en Inde, où le coût de la main-d’œuvre est plus faible.

Certes, si Washington attire les producteurs mondiaux avec des fonds et des subventions, une partie de leurs activités se déplacera vers les États-Unis. Mais à quel point ces entreprises seraient-elles efficaces? Et dans quelles mesures les subventions directes rimeraient-elles avec les principes de l’économie de marché?

Chen Fengying résume donc la stratégie des États-Unis aux tentatives de prévenir que la Chine les devance dans n’importe quel secteur.

L’experte rappelle que le déficit fiscal des États-Unis a atteint un niveau record en 2020.  Dans le même temps, Biden essaie de réformer le système des impôts pour faire rentrer plus d’argent dans les caisses de l’État depuis les entreprises et les plus aisés.

«Mais le potentiel de l’attrait de ces moyens est très limité. Donc l’économie de déficit ou de dette devient une réalité. Ils ont ouvert le robinet et inondé l’économie. Cela peut créer des problèmes structuraux y compris avec la livraison des puces».

Pas que la question de la main-d’œuvre?

Mais une main-d’œuvre moins chère est-elle l’unique raison d’un déplacement de la production des puces vers l’Est, en Corée du Sud, au Japon et à Taïwan? Admettons que ce ne sont pas les pays où la main-d’œuvre est la plus bon marché, la cause ne se cacherait-elle pas plutôt dans le fait que la production migre vers le principal marché d’écoulement qu’est la Chine?

En outre, les États-Unis sont en quelque sorte responsables de la pénurie actuelle. Pour rappel, Washington a à plusieurs reprises élargi la liste des entreprises chinoises auxquelles est interdite la livraison de composants et de puces utilisant des technologies américaines. N’est-ce là pas une raison pour les entreprises, notamment chinoises, de stocker des puces? Enfin, ces actes de Washington ont dopé les revenus de sociétés comme TSMC : n’étant pas américaine, elle a moins de difficulté à coopérer avec l’empire du Milieu.

Ainsi, il n’est pas impossible que les producteurs mondiaux soient attirés par ces subventions, mais renonceraient-ils au marché chinois? Le scénario qui se dessine est plutôt celui d’une fragmentation du marché.

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