Les parents d’une jeune fille de 17 ans violée en octobre 2020 en Isère par un homme libéré depuis quelques mois – apparemment en raison de l’épidémie de Covid-19 – ont annoncé avoir assigné l’Etat pour «faute lourde».
Les parents d’une jeune fille de 17 ans, violée en octobre 2020 en Isère par un homme libéré depuis quelques mois ont annoncé le 13 avril assigner l’Etat pour «faute lourde». Il avait vraisemblablement été libéré en raison de l’épidémie de Covid-19, qui a entraîné un volonté des autorités de diminuer le taux d’occupation des prisons.
«Notre fille est très en colère, elle ne peut pas oublier et elle veut que la justice soit rendue», a déclaré le père de la victime – qui a requis l’anonymat – lors d’une conférence de presse organisée à Lyon par son avocat Fabien Rajon. La jeune fille, âgée de 17 ans au moment des faits, a déposé plainte après avoir subi un viol le 24 octobre dernier. Son agresseur présumé a été mis en examen à Grenoble le 5 novembre pour viol sur mineure et menace de mort, et placé en détention provisoire.
Condamné en décembre 2018 à cinq ans de prison dont un avec sursis assorti d’une mise à l’épreuve pour séquestration, violences et agression sexuelle sur son ex-compagne, le trentenaire – incarcéré à la maison d’arrêt de Lyon-Corbas – avait été remis en liberté quelques mois avant les faits.
Une libération anticipée conditionnelle encouragée par l’épidémie de Covid-19 ?
Comme le prévoit la loi, à mi-peine – soit depuis le 6 janvier 2020 – ce détenu libérable le 20 novembre 2021 avait demandé à bénéficier d’une libération anticipée conditionnelle, qui lui avait été accordée à partir du 4 mai 2020. «Lors de notre dépôt de plainte, un gendarme nous a dit: « C’est une libération anticipée Covid-19 ». Cette déclaration a été un choc, une incompréhension et une colère profonde envers la justice», a ajouté le père de la victime.
Fabien Rajon a précisé que l’assignation contre l’Etat pour «faute lourde» serait envoyée ce 14 avril au tribunal judiciaire de Paris. «La responsabilité de l’institution judiciaire mérite à l’évidence, à notre sens, d’être débattue», a-t-il estimé.
Le parquet de Lyon a assuré le 13 avril dans un communiqué que la décision du juge d’application des peines (JAP) n’était «en aucun cas un jugement de remise en liberté automatique résultant de la situation de crise sanitaire, mais une décision de placement sous libération conditionnelle prise sur requête du condamné et après avis favorable du Service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP) de Lyon, de l’administration pénitentiaire et du parquet de Lyon».
Dans son jugement du 24 avril 2020, dont l’AFP a obtenu copie, le JAP s’appuie aussi sur une expertise psychiatrique du détenu concluant à un risque de récidive «faible, même s’il ne peut pas être éliminé». Le juge évoque ensuite «la situation sanitaire nationale liée à l’épidémie de coronavirus Covid-19 nécessitant que le taux d’occupation de la maison d’arrêt de Lyon-Corbas, habituellement de 130%, soit réduit afin de limiter les conséquences d’une éventuelle propagation du virus au sein de l’établissement».
Pour le parquet, le contexte sanitaire explique seulement que la décision ait été prise sans débat contradictoire, avec l’accord du condamné, le code de procédure pénale prévoyant par ailleurs que le taux d’occupation d’un établissement pénitentiaire puisse entrer en ligne de compte. Une source proche du dossier a souligné en outre que les remises en liberté liées à l’épidémie ne pouvaient pas bénéficier aux auteurs de violences intrafamiliales, parmi d’autres exceptions.