Les Iraniens sont appelés vendredi aux urnes pour choisir un nouveau président parmi des candidats pour la plupart proches de l’ayatollah Ali Khamenei dans le cadre d’un scrutin qui devrait se traduire par un important taux d’abstention sur fond notamment de difficultés économiques et d’appel au boycott des partisans des réformes.
Parmi les candidats en lice, l’ultraconservateur Ebrahim Raisi, un magistrat considéré par les analystes et les experts comme le représentant du système, fait figure de favori.
Selon des sondages officiels, seulement 40% des 59 millions d’Iraniens en droit de voter envisagent de se rendre aux urnes, ce qui devrait doucher les espoirs des autorités qui tablaient sur un taux de participation élevé à même de renforcer la légitimité de ce scrutin où de nombreux candidats modérés ont été écartés.
Les détracteurs du gouvernement attribuent ce faible intérêt pour le scrutin à la colère de la population en proie à des difficultés économiques sur fond de sanctions américaines après la sortie des Etats-Unis de l’accord de Vienne et en raison du manque de diversité des candidats.
Cinq candidats conservateurs proches du guide suprême iranien, dont l’ancien négociateur sur le nucléaire iranien Saeed Jalili, et deux autres modérés vont se disputer la succession du président modéré iranien Hassan Rouhani, qui ne pouvait plus se présenter après deux mandats.
« Ils ont aligné le soleil, la lune et le ciel pour faire d’une personne en particulier le président », a dénoncé le candidat modéré Mohsen Mehralizadeh lors d’un débat électoral télévisé.
Des centaines d’opposants en Iran et à l’étranger, dont leur chef de file Mirhossein Mousavi, assigné à résidence depuis 2011, ont appelé au boycott de l’élection présidentielle.
« Je me rangerai du côté de ceux qui en ont assez des élections humiliantes et truquées et qui ne céderont pas aux décisions en coulisses, dissimulées et secrètes », a-t-il déclaré dans un communiqué, selon le site d’opposition Kalameh.
Mirhossein Mousavi et le réformiste Mehdi Karoubi se sont présentés aux élections en 2009. Ils sont devenus des figures de proue des partisans de la réforme, qui ont organisé d’importantes manifestations à la suite de la victoire du populiste Mahmoud Ahmadinejad, dans un scrutin jugé par ces derniers comme truqué.
Si Ebrahim Raisi, chef de l’autorité judiciaire, venait à remporter l’élection de vendredi, cela pourrait accroître également ses chances de succéder un jour à l’ayatollah Ali Khamenei, qui détient le véritable pouvoir en Iran et a été deux fois président avant de revêtir le titre de guide suprême.
Executions –
Les associations de défense des droits de l’homme s’en sont pris à Ebrahim Raisi pour le rôle joué dans les exécutions de milliers de prisonniers en 1988. Ce religieux chiite, battu en 2017 par Hassan Rouhani à l’élection présidentielle, doit son accession en 2019 à l’autorité judiciaire à Ali Khamenei.
Une surprise à l’élection de vendredi n’est toutefois pas exclue.
En 2005, Mahmoud Ahmadinejad, fils de forgeron et ancien gardien de la révolution, ne faisait pas figure de favori quand il a accédé à la présidence iranienne, en battant son adversaire sortant Akbar Hashemi Rafsanjani, alors considéré comme intouchable.
« Les chances de (Saeed) Jalili de nous surprendre ne doivent pas être sous-estimées », prévient Saeed Leylaz, un analyste basé à Téhéran.
Même si publiquement, Ali Khamenei n’a apporté son soutien à aucun candidat, les analystes estiment que sa préférence va à un loyaliste comme Ebrahim Raisi ou Saeed Jalili.
La politique étrangère de l’Iran, notamment celle sur le nucléaire, largement modelée par Ali Khamenei, ne devrait connaître aucun changement majeur quel que soit le vainqueur de la présidentielle. Un faucon pourrait toutefois renforcer la ligne dure prônée par Ali Khamenei sur les affaires intérieures.
Pour séduire les électeurs touchés par la crise économique, les candidats ont promis de créer des millions d’emplois, de lutter contre l’inflation et de soutenir les contribuables à faibles revenus. Ils n’ont toutefois pas précisé la manière dont ces promesses seraient financées.
L’ensemble des candidats soutient la reprise des négociations à Vienne sur une relance de l’accord de 2015 sur le nucléaire iranien et une éventuelle levée des sanctions américaines.
Abdolnaser Hemmati a cependant souligné lors du débat télévisé que les partisans de la ligne dure recherchaient une confrontation avec l’Occident.