La question est désormais sur la table. Depuis quelques jours, le gouvernement prépare un projet de loi pouvant rendre obligatoire la vaccination des soignants contre le Covid-19.
Les débats autour d’une vaccination imposée prennent de l’ampleur et se font de plus en plus âpres, mais, pour l’heure, elle n’est pas obligatoire et personne ne peut contraindre qui que ce soit à se faire vacciner contre son gré.
Interrogé par CNews, Frédéric Calinaud, avocat en droit du travail, a confirmé qu’actuellement il était impossible d’obliger un salarié à se faire vacciner et que l’employeur pourrait recourir au télétravail ou l’affecter à d’autres fonctions.
Si celles-ci «ne font pas partie des fonctions de base du salarié, cela constitue une modification du contrat de travail et le salarié doit l’accepter. S’il refuse, on doit passer aux mesures plus contraignantes ou plus sévères […] qui peuvent aller jusqu’au licenciement», a-t-il expliqué.
L’Académie nationale de médecine avait estimé nécessaire dès le 25 mai 2021 d’envisager l’obligation vaccinale.
«Avec un taux d’efficacité de 90% à 95% contre les formes graves du Covid-19, les vaccins actuellement homologués en France contre le SARS-CoV-2 remplissent les conditions qui permettent de recourir à l’obligation vaccinale face à une épidémie redoutable», a-t-elle indiqué.
Elle a souligné dans ce contexte qu’«obligation» n’était pas «un gros mot quand il s’agit de vacciner contre le Covid-19».
Le site officiel Vaccination Info Service avait précisé pour sa part en juin 2019 qu’il s’agissait d’une «obligation individuelle, de nature contractuelle, à laquelle il [le travailleur, ndlr] ne peut déroger sans risquer une rupture de contrat, sauf en cas de contre-indication médicale reconnue par le médecin du travail».
Un rapport de l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS) sur la vaccination au travail avait lui aussi relevé dès 2016 qu’un «salarié refusant de manière injustifiée une vaccination obligatoire [pouvait] se voir licencier par l’employeur».
Obligation de vaccination
Car la pratique des vaccins obligatoires existe. Ils sont actuellement 11 en France et visent à protéger entre autres contre la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite ou encore la rougeole. La décision d’étendre la liste des trois vaccins obligatoires en l’allongeant de huit autres supplémentaires avait été prise en 2017 et est entrée en vigueur à partir de janvier 2018.
Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a déclaré le 20 mars 2015 que la vaccination d’un enfant devait rester obligatoire. Il avait été saisi du dossier après qu’un couple a refusé de faire vacciner ses deux enfants, estimant que les vaccins disponibles sur le marché présentaient trop de risques.
Ainsi, le législateur peut «définir une politique de vaccination afin de protéger la santé individuelle et collective», avait martelé le Conseil, expliquant que ce ne serait pas une infraction au respect des libertés individuelles.
Tribune de médecins
Alors que le variant Delta, plus contagieux que la souche britannique, se propage en France, les exhortations à se protéger contre le Covid-19 se multiplient. Jean Castex a émis la semaine dernière l’hypothèse d’étendre l’obligation vaccinale aux soignants, mais aussi «plus largement». Vendredi, le ministre de la Santé a tenu à préciser que la question était «abordée pour les soignants» uniquement, «pas pour les Français» en général.
Entretemps, le 4 juillet des médecins français ont publié une tribune exhortant le gouvernement à rendre obligatoire la vaccination contre le Covid-19 pour les soignants des hôpitaux et des Ehpad «avant le début du mois de septembre». Rédigée par 96 médecins, la pétition a été signée jusqu’ici par plus de 900 professionnels de santé.
Les signataires exigent que le gouvernement prenne «dès à présent la décision d’obligation vaccinale» pour le personnel des Ehpad et des hôpitaux, soulignant qu’il s’agit d’un «devoir éthique».