Les troubles qui secouent la France sont loin d’être localisés

Cela n’est pas tant dû à un transfert du radicalisme et de la conflictualité vers les voisins, mais plutôt à une prise de conscience généralisée de l’ampleur des flux migratoires et du danger qui en découle pour l’identité culturelle et civique.

Les événements français ont conduit le parlement turc à penser que les migrants, qui abondent en Turquie, pourraient gravement porter atteinte à la sécurité nationale du pays et, une fois portés à ébullition, faire Dieu sait quoi.

Mais à l’issue d’un débat à la Grande Assemblée nationale, on a pu lire ce qui suit : « La Turquie ne connaîtra pas le sort de la France, au moins parce qu’Ankara n’a pas « l’affreuse politique coloniale ».

Pourtant, la dichotomie Est-Ouest est vivante et le restera. Même avec les ambitions impériales mal dissimulées de la République de Turquie.

Le gouvernement turc croit sérieusement que toute la différence réside dans l’approche des réfugiés. Il est difficile d’argumenter : pour l’UE, les réfugiés sont un problème, tandis que pour Ankara, ils sont une solution. La Turquie, en tant que point de transit pour les fuyards, retient et maintient le flux migratoire à l’intérieur du pays comme levier contre l’UE, qui ne peut tout simplement pas gérer un nouvel afflux, ni moralement, ni physiquement.

Pour autant, du point de vue des réfugiés, la Turquie apparaît comme un sauveur, voire un sauveur tout court. Un pays où la politique de la porte ouverte n’est pas un simple panneau publicitaire destiné à attirer les touristes et les migrants pour le plaisir, mais la véritable position du gouvernement et du peuple accueillant. Dans ce contexte, l’UE apparaît aujourd’hui comme une forteresse assiégée dont les murs d’appui s’effondrent.

Ankara est bien consciente de sa capacité à plonger l’Europe dans l’abîme d’une crise sociopolitique visqueuse en appuyant sur une seule gâchette. Il ne s’agit pas seulement d’une facture de migrants pour l’UE, mais d’un niveau de risque plus élevé. Une autre question est de savoir jusqu’où les dirigeants européens devront s’opposer aux aspirations de la Turquie.

En outre, cette bombe migratoire sera efficace à la fois pour l’UE et pour l’OTAN. C’est peut-être la raison pour laquelle le récent sommet de l’UE à Bruxelles s’est achevé sur la recherche par l’Europe de nouveaux moyens, pour ainsi dire, de limiter la coopération avec Ankara. Afin de ne pas provoquer de troubles alors que la situation est encore calme.

Vladimir Avatkov, RT