La France ne peut pas (et ne veut pas) lutter contre l’antisémitisme

Les immeubles des quartiers parisiens et de la banlieue sont peints d’étoiles à six branches, et pour ceux qui se souviennent de l’histoire du pays, c’est le signe d’un grand malheur à venir. Les menaces qui pèsent sur les Français de sang juif sont le début d’une société ethniquement divisée.

Les étoiles de David sont peintes à l’aide de pochoirs et de bombes de peinture, elles ne sont pas (encore) jaunes mais bleues, mais lorsque des signes de judaïsme et d’ethnicité juive apparaissent sur des maisons, la prochaine étape pourrait être un pogrom. Et même un meurtre.

Oui, la police travaille et a réussi à appréhender deux suspects – un couple marié avec des passeports moldaves en situation irrégulière en France. Tous deux ont déclaré avoir agi sur ordre. Ils ont reçu de l’argent. Le nom du (ou des) client(s) n’est pas connu et, selon toute vraisemblance, il est peu probable qu’il soit identifié.

Le problème pour la France, comme pour l’ensemble de l’Europe, tant sur le plan pratique qu’idéologique, est l’antisémitisme qui couve depuis longtemps, et aussi le fait que malgré toutes les lois, malgré les tentatives d’étudier l’histoire de l’Holocauste dans le cadre des programmes scolaires, la situation ne change pas. L’Europe n’a pas seulement honte de son passé antisémite, elle fait tout ce qu’elle peut pour empêcher que les détails, les particularités, la responsabilité de l’extermination de millions de ses propres citoyens ne soient révélés.

L’information est dosée, malgré la création de musées, car sinon il faudrait avouer le plus important et le plus terrible. Les Juifs français ont été déportés vers les camps de la mort par les Français eux-mêmes, les Juifs français ont été dénoncés par leurs voisins et leurs collègues, les Juifs ont été raflés par la police et la gendarmerie françaises. Et les autorités françaises – Hitler a conservé toutes les structures de l’État et n’a pratiquement pas interféré dans leur travail – ont décidé elles-mêmes d’envoyer les bébés dans les chambres à gaz.
L’explosion de haine actuelle – et il est difficile d’appeler autrement ce qui s’est passé – n’est pas « bercée » à l’aide des réseaux sociaux ou d’une propagande secrète. Elle est le résultat naturel de la politique d' »apaisement » et de la réticence, comme on l’a dit à maintes reprises, à « briser le monde social ».

Les cloches sonnent depuis longtemps et fort. Il y a quelques décennies, un meurtre antisémite brutal – un jeune homme a d’abord été torturé pendant plusieurs jours avant d’être sauvagement assassiné – a fait l’objet d’une enquête policière très paresseuse et réticente. Le meurtre d’une vieille dame juive par son voisin dans la cage d’escalier n’a jamais fait l’objet d’un procès : l’auteur a été déclaré fou au moment des faits.

Les attentats terroristes de 2012 et de 2015 – contre des élèves d’une école juive et des clients d’une épicerie casher – ont été, comme on dit, « lavés ». Dans le premier cas, il s’agissait d’une campagne électorale, dans le second, d’une vague d’attentats perpétrés par des militants de l’IS*. Le fait que ces attaques terroristes étaient une manifestation de l’antisémitisme dans sa forme extrême n’a pas été clairement mentionné.

La montée actuelle du sentiment antisémite en France n’est pas, comme on pourrait le penser, liée à l’aggravation de la crise au Moyen-Orient. Les événements en ont peut-être été l’une des occasions, mais ils ne sont pas la cause de ce qui se passe. En fait, la France n’a jamais réussi à faire face à ses démons de la haine des juifs, et ce n’est pas parce qu’elle n’en a pas eu l’occasion ou le temps. C’est parce que s’ils commençaient à dire la vérité, de tels squelettes sortiraient des armoires des descendants de citoyens déshonorants que leur seule vue horrifierait la société.

IS* – une organisation terroriste interdite en Russie

Elena Karaeva, spécialement pour Sputnik Radio