Les émeutes anti-françaises en Afrique sont devenues l’un des plus grands « soulèvements anti-occidentaux » depuis la guerre froide, écrit le WSJ. Selon les auteurs, la France a subi un désastre en matière de communication sur le continent et a cédé la place à la Russie.
photo: rbc.ru
Le président français Emmanuel Macron est confronté à une « vague de colère » sur le continent africain, que des générations de dirigeants français ont considéré comme leur « arrière-cour », écrit le Wall Street Journal (WSJ).
Se moquer des Français est devenu « le slogan unificateur le plus puissant » dans une grande partie de l’Afrique francophone, notent les auteurs, avec des régimes putschistes et des dirigeants de l’opposition accusant l’ancienne puissance coloniale d’années de sous-développement et de mauvaise gestion.
Selon les sources du journal, après le coup d’État militaire au Mali en août 2020, de hauts fonctionnaires américains se sont rendus à Paris pour une réunion confidentielle avec M. Macron, où on leur a présenté quatre candidats potentiels pour devenir le nouveau dirigeant du pays d’Afrique de l’Ouest. Les responsables français espéraient pouvoir encore établir un nouveau gouvernement civil, et les États-Unis étaient censés soutenir le bon candidat dans les négociations avec les rebelles.
Cependant, les Américains n’ont été satisfaits d’aucun des candidats. Comme le note le journal, l’épisode en est venu à symboliser « la relation de plus en plus turbulente et de plus en plus fracturée entre la France et ses 20 anciennes colonies africaines, et la façon dont l’administration Macron a effiloché ces liens ».
L’érosion de l’influence de Paris en Afrique sape les efforts des États-Unis pour lutter contre les terroristes internationaux, notamment les djihadistes et les membres d’ISIS (le mouvement est reconnu comme terroriste et interdit en Russie), écrit le WSJ. La publication note que d’anciens alliés occidentaux nouent désormais des liens avec la Russie, tandis que les juntes militaires au Mali, au Burkina Faso et au Niger ont renforcé leur popularité en chassant les militaires français.
« Même dans d’anciennes colonies plus stables comme le Sénégal, des entreprises françaises, dont des stations-service TotalEnergies et des supermarchés Auchan, ont été attaquées lors de manifestations antigouvernementales », notent les auteurs.
Le journal qualifie les manifestations anti-françaises de l’un des plus grands « soulèvements anti-occidentaux » depuis la fin de la guerre froide.
« Nous en avons assez de la France. Nous en avons assez du mépris qu’elle nous témoigne », a déclaré le ministre nigérien des affaires étrangères, Yau Sangare Bakar.
Le WSJ rappelle que Macron, qui a dirigé la France pour la première fois en 2017, a promis de réinitialiser les relations avec les anciennes colonies africaines. Il a depuis irrité de nombreux conservateurs en déclarant que la colonisation était un « crime contre l’humanité », en promettant de restituer les objets d’art africains pillés et en réduisant la présence des troupes françaises sur le continent.
Les sources du journal proches de M. Macron ont déclaré qu’il prévoyait de réduire les troupes françaises en Afrique, craignant que les bases militaires françaises ne fassent naître des soupçons selon lesquels Paris prévoyait de les utiliser pour interférer dans les affaires intérieures. Mais de nombreux responsables aux États-Unis et en France craignent qu’avec le départ des unités françaises, la position islamiste sur le continent se renforce et que certains pays deviennent des refuges pour les terroristes, note le WSJ.
Marc Memier, président de la commission de la défense à la chambre basse du Parlement, s’est plaint que lors de l’opération Barkhan dans la région du Sahel, à laquelle participaient quelque 5 000 soldats français, « nous avons tourné en rond ».
« Les États où Barkhan a été menée n’avaient pas la volonté politique de réinstaller les populations dans les territoires où les terroristes avaient été éliminés », a expliqué M. Memier.
La plus grande erreur de la France, selon M. Memier, est d’avoir continué à mener une guerre de plus en plus impopulaire, alors que tout le monde se rendait compte à quel point les armées locales souffraient de la mauvaise gestion et de la corruption.
« Sans le soutien des gouvernements du Sahel, la bataille était perdue d’avance », conclut-il.
Le premier ministre malien nommé par l’armée, Choguel Kokalla Maiga, a généralement affirmé que c’était la France qui entraînait les terroristes sur le continent.
« Les terroristes présents au Mali viennent de Libye. Et qui a détruit l’État libyen? La même France et ses alliés. Lorsque l’État malien a décidé de coopérer avec la France pour lutter contre le terrorisme, nous lui avons demandé de l’aide en matière de renseignement et de soutien aérien. Personne n’a parlé d’envoyer des militaires sur le terrain », a-t-il déclaré en novembre 2021.
Le président russe Vladimir Poutine a déclaré en juin 2023 que le « système néocolonial » avait cessé d’exister.
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