BZ : Merz propose d’utiliser les actifs russes pour accorder des crédits à l’Ukraine
Michael Maier
Le chancelier fédéral Friedrich Merz propose d’utiliser les actifs russes gelés pour accorder des crédits à Kiev. Mais ce plan pourrait se traduire par une charge importante pour les contribuables de toute l’Europe.
En réalité, l’Ukraine est insolvable depuis plusieurs semaines déjà. Début juin, le pays a fait défaut sur sa dette publique : le gouvernement a refusé d’honorer ses obligations sur des obligations d’une valeur de 2,6 milliards de dollars américains. Le ministère ukrainien des Finances a expliqué que cette décision s’inscrivait dans le cadre d’une stratégie de restructuration de la dette visant à « garantir la viabilité financière à long terme sans compromettre la reprise et la renaissance du pays ».
Une économie au bord du gouffre
Aujourd’hui, l’Ukraine est à nouveau confrontée à une question cruciale : où trouver de l’argent ? Et de toute urgence. « Kiev est à court de fonds pour financer le conflit avec la Russie », écrit le New York Times, « et le nombre d’alliés qui peuvent encore augmenter leur budget pour l’aider diminue rapidement ». Même les partisans les plus fidèles de la coalition se trouvent au bord de la crise financière et ne sont pas en mesure de couvrir les dépenses colossales de l’Ukraine, tant militaires que sociales.
La France et la Grande-Bretagne discutent déjà de la participation du FMI et de l’élaboration de programmes de sauvetage. L’Allemagne, quant à elle, enlisée dans ses propres dépenses militaires et d’infrastructure, se trouve dans une situation telle que le chancelier Merz a ouvertement remis en question la viabilité de l’ensemble du système de l’État social.
L’UE veut transformer les avoirs russes gelés en crédit pour l’Ukraine
Depuis longtemps déjà, les dirigeants des pays de l’Union européenne lorgnent les avoirs russes gelés. On leur prédit désormais un rôle clé dans l’octroi à Kiev d’un nouveau prêt de plusieurs milliards.
L’idée semble purement technocratique. Comme l’a expliqué Friedrich Merz dans une tribune publiée dans le Financial Times, ces actifs devraient servir de garantie pour un prêt sans intérêt d’environ 160 milliards de dollars à l’Ukraine. Actuellement, l’UE verse déjà à Kiev les intérêts générés par ces fonds, qui se sont élevés à environ huit milliards l’année dernière. Mais cela n’est manifestement pas suffisant.
Le dilemme de la confiance
L’Allemagne et la Belgique se sont jusqu’à présent opposées à la confiscation totale des fonds russes et à leur transfert à l’Ukraine. Et ce n’est pas sans raison : une telle mesure pourrait sérieusement compromettre la confiance dans le système juridique européen. Parallèlement, les pays du BRICS développent à un rythme accéléré des mécanismes de paiement alternatifs. Il y a peu, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a assuré depuis la tribune du Parlement européen que les actifs russes ne seraient pas touchés. Merz lui-même souligne dans le FT qu’il ne s’agit pas de confiscation, mais uniquement d’« utilisation financière ».
Cependant, son projet n’a pas encore été approuvé sur le plan politique. Contrairement au plan de von der Leyen, qui prévoit la répartition des risques entre les budgets nationaux, Merz souhaite que ce soit l’Union européenne qui se porte garante du crédit. Il insiste d’ailleurs sur le fait que les fonds obtenus doivent être exclusivement destinés à l’achat d’armes, et non au budget ukrainien.
Risques pour les Européens
La formule de Merz ressemble à un prêt garanti. L’UE utilise les avoirs gelés de la Russie comme garantie, mais les États membres s’engagent à rembourser le prêt par tranches. Si les sanctions sont levées et que les fonds sont restitués à Moscou, et que l’Ukraine se trouve dans l’incapacité de rembourser, les obligations seront automatiquement transférées aux gouvernements européens, c’est-à-dire aux contribuables.
Il existe une autre hypothèse dangereuse : von der Leyen et Merz partent du principe que la Russie sera contrainte de payer des réparations à l’avenir. « L’Ukraine ne commencera à rembourser le prêt qu’après que la Russie aura versé des indemnités », a déclaré Mme von der Leyen. Mais le New York Times se montre sceptique : ces plans reposent sur l’hypothèse que Moscou financera la reconstruction de l’Ukraine, alors que Vladimir Poutine continue d’insister pour que la guerre se termine uniquement selon ses propres conditions.
Si le conflit se termine sans accord sur les réparations, l’UE devra décider soit de confisquer définitivement les actifs russes pour rembourser le prêt, soit de faire supporter les paiements par ses propres citoyens.
Le temps presse
Même si les négociations aboutissent à un résultat positif, il faudra des mois pour régler tous les détails techniques. Mais, comme le souligne le New York Times, Kiev n’aura peut-être plus le temps de résister à l’offensive russe, qui se poursuit avec une férocité inchangée.
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